Casterman Ed. - Collection
(A SUIVRE) - 1984
Il y a peu, mourrait G.J.
Arnaud.
J'avais adoré sa "Compagnie des Glaces", ses rails à l'infini et sa Caste des Aiguilleurs.
D'ici à relire, en hommage, 98 tomes d'une seule bouchée, faut pas pousser la locomotive trop loin. Alors, histoire de renouer quand même avec l'ambiance ferroviaire, j'avais le choix entre "La bête humaine" de Zola et le sifflet à vapeur de Gabin en conducteur; l'"Eternity Express" de Jean-Michel Truong et ses petits vieux embarqués vers un optimum trompeur de retraite idéalisée ... et ce "Transperceneige" de Rochette et Lob (1984).
J'ai prix un billet à bord du dernier cité, un ticket aller ET retour en sachant le voyage dystopique en diable, en voyageur condamné à perpétuité. Les trains de la Cie d'Arnaud s'arrêtent quelquefois en gare, celui de Zola respecte les horaires et prend des passagers, tandis que le "Transperceneige" jamais ne stoppe.
J'avais adoré sa "Compagnie des Glaces", ses rails à l'infini et sa Caste des Aiguilleurs.
D'ici à relire, en hommage, 98 tomes d'une seule bouchée, faut pas pousser la locomotive trop loin. Alors, histoire de renouer quand même avec l'ambiance ferroviaire, j'avais le choix entre "La bête humaine" de Zola et le sifflet à vapeur de Gabin en conducteur; l'"Eternity Express" de Jean-Michel Truong et ses petits vieux embarqués vers un optimum trompeur de retraite idéalisée ... et ce "Transperceneige" de Rochette et Lob (1984).
J'ai prix un billet à bord du dernier cité, un ticket aller ET retour en sachant le voyage dystopique en diable, en voyageur condamné à perpétuité. Les trains de la Cie d'Arnaud s'arrêtent quelquefois en gare, celui de Zola respecte les horaires et prend des passagers, tandis que le "Transperceneige" jamais ne stoppe.
La 4 de couverture de l'album reprend les deux premières vignettes
de la BD, le texte en phylactères cible bien ce qui va suivre 134 pages durant.
"Parcourant la blanche immensité
D'un hiver éternel et glacé
D'un bout à l'autre de la planète
Roule un train qui jamais ne s'arrête.
C'est le Transperceneige
aux mille et un wagons.
C'est le dernier bastion de la civilisation."
S'y est embarqué ce qui reste d'une humanité décimée. Tournent
tournent autour de la Terre celles et ceux qui ont réchappé à l'apocalypse
climatique de la Mort Blanche. Règnent
règnent un froid sibérien et une éternelle nuit. Tombent tombent de blancs et
gros flocons et rarement se montre le soleil. Courent courent les rails enneigés sous l'étrave de Sainte Loco
(dixit les propos mystiques de la Secte de ses Adorateurs).
"L'immobilisme c'est la mort" avait écrit Arnaud, "la mobilité, la vie".
"L'immobilisme c'est la mort" avait écrit Arnaud, "la mobilité, la vie".
En de telles circonstances, les hommes s'arrangeront
toujours pour reconstruire un semblant d'Avant, quitte aux mêmes erreurs,
quitte à refonder la même pyramide sociale. Le "Transperceneige" n'échappe pas à ce scénario éternellement
réécrit en pays de dystopie. Il y a les "queutards" (je cite) en fin
de convoi surpeuplé ("... que l'on décroche leurs wagons, Sainte loco n'en
ira que plus vite"), ce sont des épaves rongées par la faim et la
maladie. Il y a le "tiers convoi", nuée de miliciens, de contrôleurs
et de militaires, tous garants d'un ordre qui ne demande qu'à s'effilocher. Il
y a "Ceux de l'Avant", bien entendu nourris en suffisance et à l'aise
dans les "Wagons Dorés". Tous les travers induits par la société se retrouvent au fil des wagons: la pauvreté et l'isolement du quart-monde, le lucre, la main-mise financière et sociale de certains sur d'autres, la folie... un microcosme s'agite, le même que le notre, les hommes fourmillent dans toutes leurs faiblesses, bons sentiments, peurs et lâchetés. Rien ne s'invente, tout se recrée.
Lors, ... un Queutard outré, féroce et décidé remonte le convoi pour
enfin dire "stop" et son fait à Celui qui conduit et que personne n'a jamais vu. Ce sera le grain de sable dans l'huile des bielles qui peu à peu vont se gripper.
Si le voyage vous tente, prenez un billet, le train entre en
gare pour son ultime voyage. Il y aura, à vous attendre, la Mama qui vous
nourrira à point ou saignant; les chairs faciles du wagon-bordel; la chlorophylle
synthétique des wagons-serres, un restaurant luxueux où l'on sert les deniers
vins sur Terre, toute une enfilade de couloirs sombres et étroits où croiser
l'autre signifie souvent entrevoir l'éclair d'une lame de couteau.
Il y aura le blanc de la neige défilant de part et d'autre
derrière les vitres encrassées, celui des rares néons allumés dans le couloir
et les compartiments, celui des visages blafards sous le manque de lumière. Il
y aura le noir des coins sombres, celui des visages mal rasés, des cernes sous
les yeux lourds, des rides sur les crânes rasés et au coin des regards
blessés.
Il y aura le trait d'encre de Chine noire sous la plume de Rochette, ses taches sombres sur les
choses comme la noirceur des hommes sur leurs intentions. Il y aura les mots de
Lob dans les phylactères. Ce sera,
sous vos yeux, de la BD-roman de la grande époque du magazine (A SUIVRE). Nous sommes en 1984 pour la
première édition en album Casterman. Deux suites verront le jour (1999 et 2000)
ainsi qu'une adaptation ciné en 2013.
Les premiers tours de roues des locomotives de la Cie des Glaces datent de 1980, ceux du "Transperceneige" de 1984. Les
univers se ressemblent, je ne vois aucun inconvénient à ce qu'ils se
complètent.
Le "Transperceneige", bande dessinée d'anticipation post-apocalyptique très réussie, adulte et argumentée, me laisse augurer, je l'espère de suites de qualité.
(A SUIVRE)
Le "Transperceneige", bande dessinée d'anticipation post-apocalyptique très réussie, adulte et argumentée, me laisse augurer, je l'espère de suites de qualité.
(A SUIVRE)
J'vais vu le film (je n'ai pas lu le roman), mais cet aspect un peu outrancier de dystopie sociale m'avait un peu rebutée.
RépondreSupprimerMais une fois qu'on accepte cet élément de l'univers, c'était intéressant.
Sur grand écran, une très manichéenne dystopie à huis-clos est à l’œuvre et montre, effectivement, ses grosses ficelles, le spectateur avance sans finesse mais règles du jeu en mains : s’y faire c’est s’y plaire, même si on est assez loin de la BD de Rochette et Lob via des scénari et des esthétiques visuelles différentes. J’ai eu l’impression de compartiment en compartiment de vivre dans un jeu vidéo, avec des actions à accomplir, des boss à éliminer. L’atmosphère du film semble plus s’apparenter parfois à un conte baroque (violent et sanglant) qu’au réalisme simple d’une BD d’anticipation.
SupprimerPS : il semble exister aussi, ou à venir, une production Netflix.
Je tenterai bien le voyage
Supprimer(pas tout de suite : j'attends encore un peu avant de repasser en médiathèque...)
Vu le film également et alors que j'aimais beaucoup les précédents films de Bong Joon Ho, celui-ci m'avait bien déçu, pour les mêmes raisons que vous évoquez.
Trois tomes. Je n'ai lu que le premier. J'ai l'impression (sans en être sûr) que le long métrage a mixé les trois. A vérifier.
SupprimerA l'avoir en mains (il a son poids et un nombre de pages conséquent) et à le lire: on a l'impression d'être dans un roman (certes court mais un roman quand même). Casterman (A Suivre) avait trouvé dans ce format un sacré filon (Corto Maltèse, Manara, Tardi, Didier Comes ...).
Il ne me reste donc plus qu'à lire l'original pour comparer !
RépondreSupprimerUn podcast SF qui met pertinemment en relation triangulaire le Transperceneige (BD et 2 fois ciné), la Cie des Glaces d’Arnaud et notre cher Covid, via le confinement. Dans les trois cas un événement cloisonne la société et la métamorphose.
RépondreSupprimerhttps://podcast.ausha.co/c-est-plus-que-de-la-sf/12-snowpiercer-jean-marc-rochette?fbclid=IwAR3u6zQGq_xJrhuMiUq6RLy8TkjtbVP-nhH4YDnvwxpwzixLW9H7XYBsWjs
Apparait une nouvelle fois, à l’égal du cas de G.J. Arnaud, la notion d’un homme emporté dans un genre où il n’a que peu de racines. Le succès est au rendez-vous. Etonnant.
PS : Jean-Marc Rochette (qui, au niveau dessins reprit la série après le décès de Lob), je cite : « A partir du moment où le froid c’est fait, on est dans un monde sans couleurs. Et d’ailleurs … souvent quand je vois les bandes dessinées, quand on leur enlève les couleurs on se recentre beaucoup sur la narration ». Remarque ô combien pertinente qui offre à certains clichés photo toute leurs forces de frappe.
Un ressenti cousin qui est venu du film vers la BD, à l'inverse du mien de la BD vers le film.
RépondreSupprimerhttp://dasola.canalblog.com/archives/2013/11/02/28341139.html#ob-comments
Merci pour les liens (vers votre billet - intéressant, ainsi que vers celui de dasola sur The Snowpiercer (film) et Le transperceneige (BD) que je lui avais fait découvrir dans la foulée).
SupprimerLa mention de Corto Maltese m'évoque le combat en train blindé dans Corto Maltese en Sibérie.
La série BD Rails (4 tomes chez Delcourt dans les années 1990, dessin Simon, scénario Chauvel) évoque aussi des affrontements de trains, dans une Amérique multiraciale (affrontements entre ceux de la "garde blanche"[suprémaciste...] et ceux des "jaguars", plus ou moins pirates d'origine afro-américaine, plus faiblement armés...) [série lue mais non chroniquée. Elle existe aussi en "Intégrale"].
(s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola
Corto Maltese: l'envie d'y revenir me titille.
SupprimerBD rails: Tentantes références, merci...!