Arbre Vengeur Ed. – Collection « Arbuste Véhément » (2025)
J’ai toujours été friand de
nouvelles ; Fantastique et SF confondus ; de la short-story à la
novella ; du strict minimum à celles dodues flirtant avec le format roman.
Je les perçois comme de petites gourmandises à picorer à l’envie, des amuse-gueules
dégustés à temps perdu entre deux gros romans chronophages. L’art en est difficile :
une idée, une flèche en cœur de cible, quelques pages vite oubliées ou gravées
à jamais dans la mémoire… c’est selon, et basta.
Celles qui, issues des
Littératures de l’Imaginaire, n’ont pas été publiées depuis longtemps et se
montrant introuvables dans leur version originale, se rappellent ponctuellement
à notre bon souvenir sur le fil de rééditions courageuses, renaissent souvent
comme de belles pépites à tort oubliées ou resteront anecdotiques, tout dépend
de la pertinence du projet. Toutes ont fait, bon an mal an, le charme des
« mauvais genres », collant à l’Histoire des Littératures de
l’Imaginaire, servant de points d’ancrage chronologique en fonction de leurs
styles d’écriture.
La réédition du recueil « Nouvelles
de l’Anti-monde » s’offre t’elle un coup de jeunesse en pays de
nouveautés ? Est t’elle judicieuse ? Sa dernière occurrence éditoriale
date de 1973 pour une version originale en 62. Qu’en reste t’il ?
En 2019, une maison d’édition française
(« L’Arbre Vengeur »), se propose de nous faire lire (voire
relire), au cœur d’une de ses collections, (« L’Arbuste Véhément »),
une antique et miraculeuse pépite romanesque fantastico-science-fictive. Cynique et désespéré, « L’œil du
Purgatoire » de Jacques Spitz attire notre intérêt en 2025 vers
un autre titre du même catalogue, de même tonneau semble t’il, réédition itou, décalé
et atypique tout autant, intemporel et si peu désuet : « Nouvelles de l’anti-monde » (1962
chez Robert Laffont) de George Langelaan (1908-1972).
La curiosité s’en mêle. Poussant
plus avant, on découvre que le recueil qui nous cligne de l’œil
aujourd’hui était apparu en 1966 (rééditions internes jusqu’en 1973) en Marabout
aux Ed. Gérard, au cœur d’une double collection mythique et
incontournable, jumelle s’il en est, Fantastique & SF séparés. Marabout
F, surtout, s’était fait le chic quelques décennies durant de rééditer une
myriade de nouvelles atypiques d’essence fantastico horrifique, d’origine belge
le plus souvent, peu connues et d’excellente qualité. « Nouvelles de
l’anti-monde » parut peut-être à tort sur le versant SF de la
collection, mais quelle importance .. ! Le détour par « L’Arbre
Vengeur « s’impose donc.. !
On trouve, au sein du sommaire,
trois nouvelles qui eurent l’heur d’une adaptation ciné :
1
-« La mouche » devant la caméra
de David
Cronenberg (1986). Le long métrage fut pluri nominé et primé. A
mi-chemin entre merveilleux scientifique, Fantastique et Horreur, la nouvelle
est classique de la méthode Langerlaan.
2
L’idée irrévérencieuse de «Le miracle»
servit, de toute évidence, de base non créditée au presque éponyme long métrage
de JP Mocky « Le miraculé » (1987). Rendez-vous à Lourdes… où
l’humour noir de l’épilogue fait sourire et ricaner. L’adaptation est libre,
très libre.
3
« Robots pensants », pour
la télévision, qui revisite dans l’horreur, le thème de l’automate joueur d’échecs.
Dans « L’œil
du Purgatoire » de Spitz, le héros perçoit ceux qui l’entourent,
vision prémonitoire et merveilleux-scientifique aidant, tel qu’ils seront dans
un délai temporel de plus en plus marqué. Les humains qu’il côtoie, de plus en
plus décrépits, bientôt évanescents, de la chair vers la poussière en passant
par la putréfaction et l’état de squelette, isolent le héros dans une solitude
fatale. Le héros de « Temps mort » « Langelaan suit,
un itinéraire similaire : autour de lui, le temps se rétracte, les humains
se statufient, se pétrifient ; tandis que, pour lui, à l’inverse, les
secondes deviennent des heures. Destin tragique assuré. Chef d’œuvre du recueil.
Pour le reste, sans chercher à citer tous les textes :
.Une main n’obéit plus à qui devrait la commander («L’ autre main»).
Fantastique classique à bout de bras.
.« La dame d’outre nulle-part » préfigure les histoires d’amour
par écrans interposés.
.« Récession » qui, en boucle temporelle, de la mort vers
la naissance, de la naissance vers la mort, de la vie perdue vers celle recommencée…
offre l’immortalité sans conscience d’en bénéficier.
.« De fauteuil en déduction » qui, bien avant l’heure,
utilise le twist final de Thierry Jonquet dans « La bête et la belle ».
On voit venir de loin.
Etc….
Au final, 13 nouvelles oscillant entre SF, Fantastique et Horreur,
assaisonnées quelques fois d’humour, suffisamment atypiques pour attirer l’attention
en 2025. Nul doute que l’on y retrouve néanmoins le parfum d’une époque
qui n’est plus, mais l’essentiel est de se dire que l’ouvrage mérite peut-être
de devenir un classique.. !
Merci Babelio, Masse Critique, L'Arbre Vengeur Ed.
Marabout SF 252 (1973)
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