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vendredi 12 juillet 2019

Kurt Cobain ; Nirvana 1967-1994 - Danny Goldgerg



 Ed. Kero - 2019
 
J'entendis parler pour la première fois de Nirvana quand, en 1991, sortit leur album "Nevermind". Le single "Smells like teen spirit", en titre-phare du Lp, pilonné sur les ondes radio et TV, fit un tabac, devint hit planétaire incontestable. Le clip vidéo accompagnateur, modèle du genre, efficace et mémorable, squatta les chaînes françaises branchées musique. Suivit bientôt un autre bourgeon musical: "Come as you are" qui lui aussi envahit tout. La folie "Nevermind" boosta la Planète Musique à la périphérie du ghetto Grunge. Nirvana fut le catalyseur du mouvement de Seattle, le mit sur orbite. Kurt Cobain, auteur-compositeur-guitariste du groupe, amorça son ascension vers la starification et construisit peu à peu son destin tragique. Un mythe naquit et courre encore 25 ans après la mort de l'homme. La biographie "Kurt" de Danny Goldberg, récemment parue aux éditions Kéro, pose un regard nouveau sur une carrière hors normes, se veut reflet du passé, écho d'une empreinte musicale sur le présent et le futur. C'est une réussite parmi d'autres efforts similaires déjà parus. Il y est entre autres questions des raisons et moyens d'une ascension, des causes d'un suicide à l'apex du succès, et de la mort d'un groupe-phare privé du charisme de son leader omniprésent. Écrit par le manager du groupe (1990-1994), elle apparaît essentielle, de première main et est de plus confortée par des témoignages d'époque ou de 2019.

Je suis, à l'époque de son éclosion, passé à côté de Nirvana. Et pourtant les signes étaient là, je ne les ai pas vus, le groupe allait grimpé au firmament. J'aime immodérément le rock depuis le mitan des sixties. Mon intérêt pour le genre est ancré dans le blues (presque en exclusive) et s'est heurté au début des 80, loin du blues, à l'émergence du punk; à l'invasion à mon sens malheureuse des synthés et à celle d'Eddie Van Halen qui inventa une nouvelle manière d'aborder le hard, de manier la guitare loin des racines, de faire école auprès d'une cohorte de six-cordistes clones. J'abandonnai le rock près de dix ans durant, me replongeant dans ce qui le construisit, attendant un revival blues qui finit par venir ... et prit en marche, grâce à son énergie, pourtant loin du blues, l'émergence et le zénith du Grunge; en laissant à quai Nirvana (shame on me..!). Danny Olberg, l'auteur de Kurt, trouve ainsi lecteurs, au-delà du fan de la première heure, chez ceux venus sur le tard qui, comme moi, découvriront après coup Nirvana via les mots de la biographie et la musique d'album(s) en leur possession. Pour ma part ce furent "Nevermind" et "Unplugged in N.Y.", les deux faisant office de b.o.l. (bande originale de lecture) au gré d'une expérience sonore enthousiasmante.

Je n'ai pas cru en Nirvana, pressentant un feu de paille, entrevoyant un combo gentillet attirant un public juvénile, qui ferait trois petits tours et s'en irait le temps de quelques chansons aux refrains pop camouflés sous une musique empreinte de l'énergie du rock, un chanteur à belle gueule destiné à la pâmoison backstage.  Pourquoi m'être trompé à ce point, les avoir enterrer si vite alors que de partout, dans toutes les jeunes têtes assoiffées de rock naissait une légende et que dans la mouvance jaillissait le Grunge et renaissait Neil Young..? Pourquoi, du Grunge n'avoir retenu que Pearl Jam et Soundgarden ? DannyGoldberg, dans "Kurt" explique très bien et longuement que la force de Nirvana était d'accoler au foisonnement musical une force mélodique implacable qui était dans les cordes du leader. Le biographe présente Cobain en mélodiste s'inspirant d'un modèle hors normes: les Beatles.  Et vrai, y'a de çà, immanquablement.

Nirvana n'est pas venu seul vers le succès. Il a été porté par un punk-rock underground, presque sous-marin, qui ne cherchait pas tant le succès que la reconnaissance de ses valeurs rejetant l'enrobage commercial du rock. Ce fut une époque où il convenait pour les groupes d'être vrais, loin de l'influence des majors. Ce punk-rock militant, lui-même issu du punk de la fin des 70's, celui des Sex Pistols et autres Clash. Tout pour l'énergie, l'apparente et fausse simplicité, les morceaux brefs filant à l'essentiel, les soli avares voire absents. Nirvana en est héritier. Le biographe insiste longuement sur cet aspect et offre ainsi à son ouvrage un aspect qui vaut Histoire du genre. Sacré bonus. Il y est ainsi beaucoup question de Courtney Love (sujet polémique).

Cobain fait partie du "Club des 27" regroupant les célébrités rock décédées à l'âge de 27 ans. Et en sous ensemble, il appartient au groupe de celles et ceux s'adonnant à l'usage immodéré de toutes sortes de drogues peu recommandables. Jimi Hendrix, Jim Morisson, Janis Joplin...etc. Cobain ressemble à cette dernière via leur mal-être commun de personnalités hypersensibles.  "Kurt" de Danny Golberg trace sans concession une descente aux enfers dans le sillon des drogues, et ce jusqu'au suicide.

Si un étonnement persiste en moi c'est celui de percevoir la personnalité de Cobain compartimentée en entités différentes contradictoires. Par exemple celles s'affrontant pour trouver un équilibre entre un punk-rock fidèle aux origines et son ouverture nécessaire à un public plus ouvert. Cobain a réussi le pari étonnant de rester fermé et de s'ouvrir. A l'image du vieux blues, parler de vendre ou ne pas vendre son âme au diable fut vraiment de circonstance.

Danny Golberg trace une biographie d'intérêt sur un destin de vie hors norme, complexe et contradictoire, qui a marqué et marque encore l'histoire du rock d'une empreinte forte et indélébile.

Merci à Babelio, à Masse Critique, à Danny Goldberg et aux Ed. Kero pour cette lecture qui m'a permis de reconstruire un pan du rock que, bêtement j'avais court-circuité.

8 commentaires:

  1. ben tu vois, grâce à ta chronique, je connais le nom du chanteur :-D j'ai déjà entendu quelques titres de Nirvana, mais pour moi ça reste quelque chose de lointain, d'ancien..

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    1. MDR..! Et les musiciens de Deep Purple et de Led Zeppelin, c'étaient des idoles de la préhistoire du rock, des dinosaures, des ptérodactyles et des Tyrannosaurus Rex qui gravaient de la musique de la pointe du silex dans les parois calcaires de chambres d'écho troglodytes.

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    2. ben oui, c'est presque ça! ou mieux, se sont des martiens pour moi!

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    3. Cheyenne, tu dis ça comme si l'actuel est mieux!

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    4. Je pense que ce que Cheyenne veut souligner c'est le fait que Nirvana évolue dans un univers qui pour elle est totalement autre, qui ne l'attire pas ... d'où l'idée du martien dans le sens "étranger" du terme.

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  2. Comme toi, j'ai accroché à Nirvana à partir de Unplugged… Et j'ai accroché car je me suis rendu compte que le rock ultra agressif et torturé de leur album studio masquait un vrai talent de mélodie que le l'unplugged révélait. La claque.
    Puis, c'est Kurt, un artiste entier. Il y avait du Brel dans l'intensité de son interprétation. Quand tu dis qu'il était à la fois fermé et ouvert, je ne pense pas qu'il se soit soucié des avis. Je le vois comme quelqu'un d'intègre, entier et que son talent à amener (obliger) le public a adhérer sans que lui ne change en quoi que ce soit, sinon en mal-être vis à vis de la célébrité.

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    1. Oui. L'auteur le laisse plus qu'entendre en affirmant que son ambition était de poursuivre dans la lignée mélodique d'unplugged mais... tout en restant fidèle au style qui l'avait amené au succès: le punk-rock. Mais il ne précise pas qu'il y ai eu corrélation entre cette dichotomie et le suicide, il laisse plus sous-entendre que les événements surtout autres se sont largement bousculés autour de lui.

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    2. Kurt devait avoir une sensibilité exacerbé, entière.

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