Ed. Casterman - 2014
Quelqu'un, ici, sur Babelio,
a eu les mots pour me convaincre d'aller vers ce dessinateur/scénariste
français, Christian de Metter, que
je ne connaissais pas encore. Quand, sur le site, les coups de cœur argumentés
libèrent des chroniques enthousiastes et sans fard, via des mots simples comme
sortis du cœur, les livres lus sous l'impulsion ne sont presque jamais sources de
désenchantement. Il est rare de ne pas être emballé à son tour. C'est le cas
ici.
Je suis moins BD que roman traditionnel. Néanmoins quand
elle est pavé graphique (ici 120 pages) l'envie parfois me vient d'y goûter. Il
me semble y trouver plus de matière que sur une BD classique vite lue vite
consommée; et, partant, plus de temps à y consacrer, à éventuellement savourer.
Je suis plus Polar que Western. L'illustration de couverture
ne laissant aucun doute sur l'ancrage au pays des cow-boys, j'aurais pu passer
mon tour; si ce n'était que du titre suintait un lourd parfum polar qui méritait
de pousser plus avant. Le rouge, celui du sang, celui du meurtre est si typique
de la matière policière. Quand à la neige immaculée ... elle n'est que la page
vierge de mystères non encore écrits et élucidés.
Colorado. Hiver 1896. La Guerre de Sécession est terminée
depuis un an. Jodi MacKinley et son
jeune fils Sean vivent seuls dans
leur ferme isolée depuis que le mari, George,
est mort à la guerre dans les rangs de l'Union et qu'Abby la cadette a disparue depuis six ans, elle était alors si
petite.
A la croisée des parallèles, dans la petite ville voisine, Bucky MacFly, un marginal pour le moins
énigmatique, est jugé pour rapt présumé mais raté d'enfant. Le procès attire la
jeune veuve avec l'espoir d'encore trouver Abby
vivante.
Jody et Bucky
vont se rencontrer au procès, déjà s'affronter sur le fil du rasoir d'un double
jeu dominant/dominée. Le second en pervers narcissique dans l'objectif de sa
simple survie. La première viscéralement maternelle et instinctive, nourrie
d'espoirs incertains.
A l'issue d'une longue traque dans la neige, brutale et
sanglante, les deux se verront emportés, sans espoir de retour, vers leurs
destins réciproques.
Le redoutable hiver qui sévit sera le background visuel,
l'écrin blanc et froid, l'échiquier naturel sur lequel s'agitent des pièces
d'inégales valeurs au sein d'un jeu mortel sans règles bien précises. Personne
ne sortira indemne de ce Grand Blanc, de ce Grand Nulle Part, de ce Grand Rien
où la neige est tout et le sang une simple signature . Le KO est dans l'air. A
qui le mat quand net et pat sont impossibles ? Chaque personnage, quel que soit
son rang dans le drame en cours, simple pion ou pièce maîtresse, se verra
ciselé au ras de ses mécanismes psychologiques internes via les tournures du
dessin ou celles écrites dans les phylactères.
Les éléments de l'intrigue à minima ici présentés ne sont
qu'un début, la suite appartient au magnifique roman graphique en cours. Je
vous laisse, si l'appât vous tente, entre les mains d'un redoutable scénariste
qui a plus d'un tour dans son phylactère, entre les pinceaux, crayons et
couleurs d'un dessinateur attachant, maître de son art. L'histoire au terme de
rebondissements bien amenés prend aux tripes, elle a du cœur et une épaisseur
dramatique digne d'un roman classique.
C'est du western mais aussi du thriller pur jus. L'auteur
joue de son lecteur comme les maîtres du genre l'ont fait. l'intrigue est
tordue, sinueuse, alambiquée et prenante. Adaptée au cinéma l'intrigue
prendrait les habits d'un road-movie dans lequel les chevaux remplaceraient les
bolides automobiles.
Au niveau dessin: de Metter nous gratifie d'un crayonné
léger, de peu ou pas d'encrage; presque des croquis, des esquisses/ébauches
colorées proches de la photographie. La surprise première laisse place à l'ébahissement:
c'est beau, c'est de l'art et çà parle au cœur et à l'âme. Les coups de
crayons nous montrent la nature dans sa beauté hivernale et des hommes au ras
de leurs amours et de leurs haines, de ce qu'ils sont au plus près .
Les couleurs d'automne omniprésentes, en prémisses de
l'effacement de celles d'hiver, surlignent le froid régnant, la dureté des
conditions, l'isolement de la tragédie en cours dans le Grand Blanc, le presque
grand vide qui l'entoure.
là je dois dire que tu m'as convaincue.. si je le trouve dans ma médiathèque, je le prends! y aurait pas moyen de mettre une photo de l'intérieur du livre? ( pour voir les dessins )
RépondreSupprimerOn voit les dix premières pages sur BDGest' (faut cliquer dessus pour les voir en grand)
Supprimerje viens de vérifier.. il est dispo dans ma médiathèque!!
RépondreSupprimerEssaies le. Je suis très curieux de ton avis.
Supprimer