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lundi 27 avril 2020

L'horloger d'Everton - Georges Simenon (1954)


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Rééditions Omnibus 1989 et France Loisirs 2016




 Livre de Poche - Réédition 2000

"L'horloger d'Everton" (1954) est l'un des 132 "romans durs" de Georges Simenon définis, selon l'auteur lui-même, comme l'ensemble des titres, sous sa plume, sans la présence de Maigret. Il y peint, sans concession et au plus près des âmes, "l'homme nu et seul au monde" (dixit). Littérature générale bon teint, si ce n'est qu'en leitmotivs récurrents rôdent souvent la justice aux aguets, les enquêteurs opiniâtres, la pègre ... et tous les autres ingrédients du roman policier.

"L'horloger d'Everton": 100 pages à peine en "Omnibus - Tout Simenon n°7" (réédition de 1989) pour tailler le portrait complexe, attachant et plein d'empathie, d'un homme perdu à la recherche de lui-même, des siens et de ceux en arrière plan d'un monde, celui des "autres", dont il ne possède plus ni les clefs de compréhension ni d'insertion.

Le roman se termine par ces mots: "Shadow Rock Farm, Lakeville (Connecticut), le 24 mars 1954", qui sans spoiler le drame qui vient de se refermer, font remonter le manuscrit à la  période américaine de l'auteur. Simenon, carte verte en main, abandonne les quartiers parisiens aux rues bourdonnantes, les petits muscadets engloutis à la va-vite aux comptoirs des bistrots; l'ailleurs provincial s'efface: celui des petits ports de pêche, des canaux aux écluses étroites, des bourgades isolées, taiseuses et repliées sur leurs secrets de bourgeoisie recluse. L'auteur laisse derrière lui la pluie, le froid, la canicule, la brume rampante, le poêle rougeoyant, la fenêtre d'hôtel ouverte sur l'été campagnard. L'action prend place aux States et le lecteur y perd cette France que savait si bien décrire et faire vivre Simenon, au profit d'horizons nouveaux que l'auteur peine à imposer car, sans doute, les vivant moins intensément et en approche trop récente. N'empêche, les hommes sont toujours les mêmes des deux côtés de l'Atlantique et Simenon, avec ses nouveaux voisins d'outre océan à disséquer, garde tout son talent d'évocation. Bertrand Tavernier, en 1974, avec son adaptation ciné du présent roman donne au Vieux Lyon et au quartier de la Croix-Rousse un cadre plus évocateur de l'univers typique de l'auteur.

Everton, petite bourgade semi rurale de l'état de New-York, durant les années 50's.
Dave Galloway, la quarantaine, est un horloger consciencieux et courtois, bien inséré dans sa paisible communauté. C'est un homme calme, un brin solitaire et introverti qui, dans sa vie, n'a commis qu'une erreur: celle d'épouser par provocation, trop jeune et immature, une femme qui n'était pas fait pour lui, un rien volage et supportant mal la monotonie du quotidien matrimonial. Il a 26 ans quand naît Ben, son fils qui restera unique. Son épouse le quitte et lui abandonne l'enfant lorsqu'il a 6 mois. Le père ne se remariera jamais et désormais élève son rejeton seul et du mieux qu'il peut.
Ben a seize ans à peine, quand s'entichant d'une jeune fille de son age, il entame en sa compagnie un court road trip meurtrier, dans l’intention de gagner un autre état où la législation permettra au jeune couple de se marier. Le périple tourne court et les fuyards sont livrés à la justice.
Le père, par devoir et amour paternel, est jusqu’au-boutisme désireux de tirer son fils de ce faux pas; il va se heurter à l'incommunicabilité soudaine née entre son enfant et lui, deux êtres qui jusqu'à présent faisaient corps face à l'adversité.

La suite appartient au récit....

Les rapports entre les deux hommes, subitement inexistants, le fils niant la présence du père, sont le centre du propos de Simenon. La situation, vue du côté du père, presque en un "je narratif" introspectif, laisse dans l'ombre les raisons du fils. Il faudra attendre l'épilogue pour les entrevoir.
L'auteur nous guide au coeur d'un système policier et judiciaire complexe que le père ne comprend pas vraiment, n'admet pas appliqué à son enfant, ne parvient pas à manipuler à sa guise.
Dave Galloway louvoie de policiers procéduriers peu enclins à la compassion en districts attorneys inflexibles, en passant par un avocat trop gourmand, directif et évasif.

Et, ce regard d'adolescent derrière la barre des accusés, désormais replié sur lui même, sans cesse fuyant les yeux du père, sans qu'aucune connivence ni affection ne transpire. L'enfant a dressé un mur et rien, apparemment, ne peut le franchir. L'explication viendra, mais si fragile et de si peu d'espoi.
... Simenon noir ne se refait pas.

9 commentaires:

  1. Il me plait bien ce petit roman ... le fils s'en renfermé parce qu'il a commis l'irréparable? je le vois bien comme ça..

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    1. Oui et surtout non, c'est beaucoup plus complexe que çà.
      Petit roman ? Court roman plutôt. Simenon avait l'art et la manière de faire bref, concis et argumenté. Du vite lu qui reste durablement en mémoire.

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    2. Et pour mettre sur la piste de l'épilogue, on y trouve dans l'intention (je répète: dans l'intention)quelque chose de Zola. MDR

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  2. Quand tu dis "faux-pas" après un road-trip meurtrier, j'ai l'impression que c'est un doux euphémisme. Inutile de dire que ce roman, la façon dont tu en parles me tente énormément.

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    1. Les deux ne sont pas Bonnie and Clyde, non plus. L'escapade est brève, la reddition rapide, elle laisse un corps sur le tapis; juste ce qu'il faut pour, qu'en ces années 50s US, un homme, seize ans à peine ou pas, risque la peine de mort.
      Le roman est bon, mais ce n'est pas mon meilleur "dur" lu. D'autres ont plus de forces...

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    2. J'ai commenté le précédent article de Simenon, je suppose qu'il est partie de les limbes de l'internet.

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    3. Le Triangle des Bermudes encore ? Tu l'as encore sous la main si ce n'est pas celui qui commence par "Une nouvelle fois ce que tu dis sur ce roman" ?

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    4. Non non, c'était Maigret se trompe!

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    5. Mon background de blog recense les comms en un lieu à part. Je ne viens d'y trouver rien d'autre que ce qui est affiché actuellement dans la colonne de droite en façade de blog. Cà c'est peut-être joué dans la validation ? En forum SF j'avais pris l'habitude, d'autant plus si le post à livrer était copieux (la galère de le recommencer), de sauvegarder temporairement en copié-collé éphémères sous clics gauche/droit, de vérifier si l'envoi avait été effectif. Je ne sais quoi te dire de plus..!

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