Accueil

Accueil
Retour à l'Accueil

lundi 18 septembre 2023

Maigret et le tueur - Georges Simenon (1969)

 


 Réédition format poche de 1971 aux Presses de la Cité d'un roman paru en 1969 chez le même éditeur. Pré-publication dans le Figaro (1969)

Maigret est t’il intemporel ? Son personnage, immuable sur son fond et sa manière, semble, pour maints lecteurs, interminablement figé dans la tranche temporelle désuète des années 30’s. On le croise sans cesse au cœur d’un passé révolu où tout reste inchangé d’un roman l’autre, où s’y agite un monde d’apparence immortel. Rien de plus inexact, même si la série TV avec Bruno Cremer conforte cette impression (celle avec Jean Richard est plus moderne en backstage). Le lecteur est face à une fausse impression d’immobilité temporelle puisque l’auteur et son personnage ont évolués de concert, certes à minima, imperceptiblement, sur le fil régulier des 81 Maigret parus. Le premier date de 1931, le dernier de 1972 : 40 ans de longévité, en accord avec l’immuabilité des travers humains tandis qu’en background le monde évolue. Le changement surgit, par exemple, quand dans « Maigret et le tueur » (1969) apparait, presque en vedette, l’artéfact pourtant légitime et non anachronique d’un objet technologique inventé en 1963, la mini-cassette (qui maintenant, et à son tour, est bien datée, mais c’est une autre histoire)

Antoine Batille, jeune étudiant issu d’une famille aisée, a la curieuse passion d’enregistrer sur mini-cassette les conversations volées qu’il capture dans les lieux publics. C’est pour lui, à l’égal de l’art de la photographie, un moyen de saisir l’homme sur le vif et de le disséquer psychologiquement (on peut y voir une parenté avec « L’homme nu » cher à Simenon). Son activité ne va pas sans fréquenter certains lieux difficiles de la capitale … où son micro capte, un soir, une très curieuse conversation dans un bistrot bondé. Rue Popincourt, dans la foulée, il est poignardé de sept coups de couteau. Maigret est sur le coup.

«  Maigret et le tueur » est un roman en deux parties. Les ¾ initiaux suivent les règles classiques du roman policier où s’agite la pègre et ses personnages archétypaux (enquête discrète, filatures, coups de filets, interrogatoires, truands à la petite semaine, cambrioleurs … etc). Simenon s’y montre en obligation de (mauvais) genre mais ne semble pas à son aise, le Milieu n’est pas son fort. Le reste cible habilement les états d’âme, le repentir et la reddition difficile d’un tueur en série via ses lettres anonymes successives (la presse se régale) et une subtile confession téléphonique qu’il entretient avec Maigret. Le syndrome psychiatrique n’est ici qu’effleuré, l’analyse est rapide et aurait mérité que l’on s’y attarde plus longtemps. Simenon ne s’y est que peu aventuré dans sa bibliographie, mais le rendu est attachant et suscite l’empathie. Maigret, en funambule prudent, cherche à ne pas effrayer sa proie consentante, à capter un fond d’humanité propice à la clémence des jurés. « L’homme nu » disséqué est l’âme d’un homme dont le lecteur se souviendra.

J’ai eu l’impression de lire deux longues nouvelles emboitées l’une dans l’autre pour, au final, donner naissance à un roman unique. Rien de rédhibitoire, les deux s’articulent au mieux. Une excellente lecture, au final.

1 commentaire:

  1. Mais aussi: téléfilm français signé Marcel Cravenne et diffusé en 1978; avec Jean Richard. Pas de Crèmer sur ce coup

    RépondreSupprimer

Articles les plus consultés