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dimanche 3 décembre 2023

Beck Bogert & Appice – Live in Japan (1973)

 

Version vinyle : front, inside & insert (1973).

 

 C’était le temps des soli : guitares en cavalcades semi-improvisées, basses grondantes de Boeings au décollage, batteries comme marteaux sur l’enclume. C’était le temps du fracas démesuré des décibels offerts sans compter, des boules Quies éjectées en «pop» de bouchons de champagne …

Beck Bogert and Appice (aka BBA) fut un éphémère power-trio anglo-américain. Né fin 1972, il se sépara prématurément début 1974. Le combo délivra un hard-blues gonflé aux amphètes, teinté de funk lourd et d’une pincée de soul, le tout bourré d’impros et d’expérimentations psyché inspirées et hallucinées. Le combo, à sa naissance, laissa entrevoir un potentiel extraordinaire qui, faute de temps, de patience et de compréhension mutuelle entre ses membres, ne se révéla peut-être qu’à moitié. On y trouvait (excusez du peu.. !): Jeff Beck (GB) à la guitare, ex Yardbirds et Jeff Beck Group (1&2) ; Tim Bogert et Carmine Appice (USA), basse et batterie, tous deux ex noyau rythmique de Vanilla Fudge et Cactus. Rien que des noms magiques et légendaires, des pointures reconnues, des adeptes du gros son, graisseux et lourd … !

On perçoit BBA, de nos jours, comme un combo relativement représentatif du hard-rock des 70’s débutantes. A cette époque, les longues envolées en live prédominent, le public les plébiscite, BBA les offre sans compter. A l’image des fulgurantes carrières de Cream (1966-1968) et de West/Bruce & Laing (1972-1974) bâties elles aussi en trios, BBA mit au service de son collectif des individualités virtuoses et égotiques, habilla son line-up d’un guitar-hero atypique et lunatique, d’un bassiste volubile et prégnant, d’un batteur en maitre cogneur-marteleur. Le groupe fut contraint au split sous le poids de ses dissensions internes, du choc des égos en présence. BBA était dès le départ, c’était écrit d’avance, programmé en DLU à court terme, et condamné à devenir culte. Le combo se reforma ponctuellement sans Beck sous d’autres acronymes : DBA (Derringer, Bogert & Appice), BA (Bogert & Appice)(avec Teddy Rodinelli à la guitare) … Trois petits tours et puis s’en sont allés, là aussi. Sale temps pour les trios de super-héros ... !

BBA se percevait comme un tout plus grand que la somme de ses parties. C’était l’espoir que le combo caressait, mais il y eut loin de la coupe aux lèvres, même si, par instants, le groupe tutoya les étoiles. Deux/trois ans, c’était, à cette époque, le laps de temps habituel en strict maximum suffisant pour que Beck s’emballe sur un projet, y appose sa marque indélébile puis passe à tout autre chose, laissant le soufflé retombé. BBA ne perdura qu’une année pleine et entière. Ce fut une comète à la brève mais éblouissante trajectoire. A son actif : deux LPs studio (le second n’est jamais paru), un album live exceptionnel … Ensuite, le combo s’en est allé au cimetière des éléphants (qu’il ne méritait cependant pas de par sa longévité).

BBA fut un de ces « Supergroups » que le Rock engendra, que le public encensa, rejeta ou oublia. L’appellation cible ces combos montés artificiellement, alliant de bric et de broc des talents instrumentaux hors-normes (et quelques fois disparates). Il n’est question ici que de la somme de curriculum vitæ exceptionnels au service de collectifs hypothétiques. Cream (Clapton+Bruce+Baker) en est le parfait stéréotype (1966-1968). L’intention première, souvent à l’initiative des maisons de disques elles-mêmes, est plus mercantile qu’artistique. L’espoir financier est que le tout soit exponentiellement bankable. Ce n’est souvent qu’un coup de poker quand, les frictions internes induites par autant d’égos disproportionnés au m² dégénèrent rapidement, et ce jusqu’à l’implosion et au split. BBA n’échappa nullement à la règle. L’exercice, difficile et périlleux, évoque des funambules en équilibre instable sur le même fil, tirant de droite ou de gauche sans réel souci des uns et des autres. Mais, par instants, l’état de grâce s’imposa, la cohabitation espérée porta ses fruits et la magie opéra, « Live in Japan 1973 » en est quelques fois l’écho.

BBA, de nos jours, est une légende. Elle renait dans l’actualité rock de 2023, soit 50 ans plus tard en manière d’anniversaire, grâce à la parution d’un box-set audio grand luxe (4 CDs) qui semble avoir tout pour plaire. L’album « Live in Japan 73 » (2 Lps) y est réédité en version remasterisée et augmentée d’un autre concert daté de 74, londonien et inédit. Je n’ai pas acheté le coffret, la présente chronique est principalement centrée sur « Live in Japan 73 » paru peu après le split de BBA.

S’il est un album rock culte, c’est peut-être celui-ci, mais à sa manière …. faut dire qu’il a une histoire étonnante, mais pas celle, habituelle, des LPs devenus légendaires après coup, faute d’avoir loupé sa cible dès l’instant de parution …

Je me souviens, ado, avoir vu à la TV le show du Bataclan (20/02/1973) ; c’était en n&b (il me semble.. ?) et sur l’A2 (« Bonjour c’est Pop 2 » susurrait Patrice Blanc-Francard en intro de toutes ses émissions). La puissance de frappe du power trio m’avait sidéré, cloué sur place, scotché, vitrifié. J’ai acheté leur premier LP homonyme dans la foulée, BBA n’y montrait rien d’enthousiasmant si ce n’est une certaine malaisance en studio (sans doute dû au fait que l’ingé son cherchait un son clean, bien propret, hyperléché alors que BBA c’était quand même un groupe de scène type, spontané, graisseux et lourd , taillé pour l’instant.

J’attendais le live …

A parution initiale la même année, le double-vinyle enregistré en public au Japon les 18 & 19/05/1973 fut d’emblée une rareté discographique. On ne le trouva qu’en import japonais, et encore ... fallait s’en remettre à la chance. Il était vendu, en outre, à un prix exorbitant (ce fut la seule et unique fois où l’on me vit céder à une telle fantaisie). Alors oui, pour justifier le prix : il y avait la qualité du son, celle de l’objet, son fini, le Obi en fragile bandeau, les caractères typographiques japonais … et tout çà et tout çà .. ! Mais quand même. C’est dire si j’en ai pris soin du bestiau vinylique ; jusqu’à ne l’écouter que le temps de le basculer sur K7 et d’user ensuite la bande magnétique jusqu’à son ultime micron d’épaisseur restant (ou a-t-elle été bouffée par le mécanisme interne du magnéto K7, j’sais plus ?).

Beck avait la bougeotte en éternel instable, il avait déjà en tête des horizons jazz-rock, à l’opposé même de ce qu’il fit avec BBA. M’en fous, il pouvait faire ce qu’il voulait, je n’avais qu’à le suivre …

Illustration sonore: "Superstition"


 Version coffret 4CDs 2023

 

Side one

01.         "Superstition" (Stevie Wonder) 5:17

02.         "Lose Myself with You" (Jeff Beck, Carmine Appice, Tim Bogert, Pete French)       10:49

03.         "Jeff's Boogie" (Beck, Chris Dreja, Jim McCarty, Keith Relf, Paul Samwell-Smith)  3:33

Side two

1.            "Going Down" (Don Nix)               3:32

2.            "Boogie" (Beck, Appice, Bogert) 4:58

3.            "Morning Dew" (Bonnie Dobson, Tim Rose)        14:11

Side three

1.            "Sweet Sweet Surrender" (Nix)  4:43

2.            "Livin' Alone" (Beck, Appice, Bogert)       6:11

3.            "I'm So Proud" (Curtis Mayfield)               5:42

4.            "Lady" (Beck, Appice, Bogert, French)    6:16

Side four

1.            "Black Cat Moan" (Nix)  9:13

2.            "Why Should I Care" (Raymond Louis Kennedy) 7:20

3.            "Plynth/Shotgun (Medley)" (Nicky Hopkins, Rod Stewart, Ronnie Wood, Autry (Junior Walker) DeWalt)   5:57

 

Jeff Beck – guitar, talkbox; lead vocals (track 8)   

Tim Bogert – bass guitar, vocals; lead vocals (tracks 1, 7, 10, 11, 12)

Carmine Appice – drums, vocals; lead vocals (tracks 2, 3, 4, 5, 6, 12)

 


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