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mercredi 4 septembre 2024

Grand Funk Railroad – Live Album (1970) & Survival (1971)



      

Grand Funk Railroad, un power trio de hard-rock US. Sa spécialité : les décibels, en tsunami sonore depuis la scène. La qualité de ses prestations semblait se mesurer en watts libérés depuis ses amplis*. Bien sûr d’autres groupes, sans doute, ont fait pire avant et après, mais cette réputation a suivi et peut-être desservi GFR.

Welcome in Acouphènes land.

Formé en 69, Grand Funk Railroad est originaire du Michigan. « Live album » (November, 16th 1970) est leur 1er album enregistré en public. Il est chronologiquement inséré, au creux d’un laps de temps très court (un an même pas), entre deux opus studio : « Closer to home » (June 15, 1970) et « Survival » (April 1971).

 


 « Live-album » propose un show frustre, brut de décoffrage. L’album affiche un son mal dégrossi, presque pourrave, volontairement privé de tout remix en post-production ; il est chauffé au fer blanc, martelé sur l’enclume, over-boosté à faire tressauter les boules Quies sur la peau des tympans. La une de pochette, une photo en n&b, offre un parfait écho visuel de ce que le groupe montrait (et laissait entendre sur scène) : une surpuissance assumée exacerbant la virulence et la spontanéité de l’instant, offrant un sentiment d’urgence à la situation. Sur le cliché, un effet de bougé fixe la chevelure virevoltante de Mark Farner (le guitariste/chanteur) dans un headbanging frénétique. L’instantané photographique semble issu d’une rafale lumineuse stroboscopique qui vient titiller et agacer la rétine et par contrecoups l’oreille interne et le neurone.

Péril en la demeure acoustique.


 
« Survival ». Une théâtralité grand-guignolesque affichée sur la pochette de l’album à la manière de celle, encore à venir, de Manovar. Une mise en scène préhistorique calculée. Un effet (2nd degré) garanti. Le Lp fera dans le sauvage, le saignant et le brutal. La une de couverture le montre : sortez les massues, les peux de mammouths, les lance-pierres et les haches à silex. Welcome in Crockmagnon’s land. Là où le rock primal hurle à la Lune et où la Guerre du Feu rejoint celle de l’Électricité dans les amplis en fond de cavernes …

… Trockglodyte’s rock et Nehardertal’s boogie. 

GFR, en 70/71, remplit les stades et voit ses albums se vendre comme des petits pains. Le groupe s’exporte convenablement à l’international ; c’est le symétrique lourdingue de Led Zed et consorts de l’autre côté de l’Atlantique. Son penchant décibélique fascine les ados et les pousse vers une expérience auditive jusqu’au-boutiste. La puissance sonore délivrée est sa marque de fabrique ; elle attire les ados vers une expérience auditive jusqu’au-boutiste. Au même titre que, deux ans plus tard, le 2ème degré vestimentaire, les maquillages et la puissance sonore de Kiss feront un tabac auprès d’un public similaire.

GFR, c’est aussi le bouc émissaire de la rock-critic d’alors. 

Qui veut la peau de GFR ?

Eh bien, moi, j’aimais bien et continue à apprécier le combo par-delà les décennies écoulées puisqu’on y retrouve tout l’esprit hard-rock de ces années-là, et ce même jusqu’à sa caricature simplifiée du genre. GFR a fait le sang d’une époque, celle de la bascule hard-rock entre les 60’s et 70’s. De gargantuesques basses ronflantes à l’avant-scène (on est quand même loin de Jack Bruce dans Cream), une guitare suraigüe aux riffs acérés et aux lourds soli psychés, des drums qui cognent sans délicatesse (on n’échappe pas au solo pachydermique en cours de shows), des vocaux accrocheurs. GFR ne faisait qu’illusion mais on pardonnait. Le « Live Album » fut un de mes premiers LPs achetés ; pas d’overdubs prétend la pochette, c’est du brut sans affinage, un son live tel que délivré un soir de concert, du boucan presque revendiqué. Pas de duperies sur la marchandise, les imperfections étaient assumées.

Aller voir et surtout entendre GFR sur scène c’était accepter le raz-de-marée sonore, le tsunami invisible des ondes hertziennes à ras de tympans ; c’était accepter de manière prémonitoire le sonotone à venir à l’horizon de la quarantaine … bref hypothéquer la stabilité et la perméabilté acoustique du reste à entendre.

J’avais 16 ans. Le n°37 d’août 1971 du magazine Best (satellite concurrentiel, aujourd’hui défunt, de « Rock &Folk ») nous parle de Grand Funk Railroad à l’occasion d’un concert du groupe donné à l’Olympia. Les pros de la rédaction, ces bien-pensants guides d’un rock élitiste à leur convenance, y pondent sous l’intitulé : « Grand Funk Railroad ou quand les Boeings décollent », un article décoiffant qui, d’une métaphore unique, condamne et affirme que la messe est dite, que l’affaire est close, que le groupe ne vaut rien et gueule trop pour être crédible. 

Alors oui, Grand Funk Railroad c’était du bourrin, du gras percheron de labours trainant un saphir soc-de-charrue dans le délicat sillon de vinyle noire de nos platines HIFI. C’était un Rock n’ Roll Circus Haut-Décibélique, une sono pharaonique over-boostée, du Ted Nugent avant l’heure à cavaler au grand galop sur nos tympans, des décibels sur un puissant souffle d’air qui faisait reculer les premiers rangs, les cages thoraciques martelées sous les coups de piston de la rythmique. Oui, GFR avait autant de délicatesse et de grâce qu’un rhinocéros épileptique dans un semi-remorque rempli de paquets de chips, qu’un hippopotame-funambule déambulant sur un élastique …

… mais je m’en fichais, j’étais jeune et ceux qui allaient à leurs concerts aussi. Perso, je me contentais d'en rêver les oreilles aux aguets et les tympans à vif.

PS: Tout cela est bien caricatural. MDR. Faut dire aussi que mes souvenirs d'époque se réfèrent au peu de disques que je possédais: c'était çà ou John Baez et/ou Cat Stevens. Rock & Folk m'avait dit que les deux derniers c'était mieux. Mais va dire çà à mes oreilles d'alors qui ne m'obéissaient même plus.

*102 dBs max (« un velours pour les tympans ») depuis 2017 par décret. Avant : aux alentours de 130 pour Motorhead « Si on joue près de chez vous votre pelouse ne repoussera jamais » Lemmy Killmister dixit ; les Who, Deep Purple, Kiss, ACDC, Manowar … Ted Nugent et GFR.

 Illustration sonore: Paranoid (Live At West Palm Beach Civic Auditorium, FL

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