Accueil

Accueil
Retour à l'Accueil

vendredi 3 janvier 2025

Maigret se défend – Maigret – Georges Simenon

1964. Réédition 2009 en LdP n°14319

 

Convoqué par le Préfet de Police, Maigret apprend qu’une plainte pour tentative de viol vient d’être portée à son encontre par une jeune fille issue d’une famille très influente. La veille, celle qu’il a cru à tort, sous une identité différente, pauvre provinciale perdue dans la capitale et qu’il a guidé vers un hôtel respectable, est en réalité une étudiante à la Sorbonne peu assidue, habituée des snobs caves à jazz privées qui fleurissent dans la capitale, fille à papa dans toute sa splendeur, adepte de soirées huppées, de tapages nocturnes et de grosses cylindrées.

Maigret se sait innocent et entend le prouver, surtout si, d’emblée, sa hiérarchie lui interdit d’enquêter sur son affaire. On cherche manifestement à le mettre sur la touche, ses supérieurs lui tournent le dos et se rangent à la cabale venue d’encore plus haut. Une machination ? Oui, mais qui en est le commanditaire ? Qui pour le calomnier ? Et pourquoi ?

Est-ce le jeune préfet lui-même, jaloux de l’exposition médiatique dont profite Maigret et ses méthodes d’antan, alors que les siennes, modernes, qu’il juge futur naturel de la profession restent sans échos de prestige, sans publicité pour sa carrière ?

Est-ce Palmeri, un ex maffieux à la retraite ? Le truand joue sans doute encore les prolongations dans le Milieu via une série de vols de bijoux récurrents que Maigret ne parvient pas à décrypter. Cela fait 20 ans que cela dure. Palmeri, un caïd sur la touche, un homme diminué, en fauteuil roulant suite à un règlement de comptes il y a quelques années ? Un être fini ?

Est-ce sa compagne, Aline ? Une ex tapineuse au parler parfois fleuri, virant peu à peu à la femme respectable, voire même d’un certain prestige. Eux deux, un couple mystérieux et atypique, tendre et attachant ; tout l’un pour l’autre ; lui qu’elle appelle « papa » et qui l’a sauvé du trottoir ; elle qui n’était rien et devient tout entre amie, maman, amante et auxiliaire de vie.

Une étrange amitié semble lier Palmeri (un tantinet indicateur) et Maigret. On sent entre eux que tout oppose, à demi-mots, sur le fil de non-dits librement consentis, une admiration réciproque et un respect de classes entre un truand à l’ancienne mode et son antithèse policière. Deux hommes face à face, deux mondes opposés qui se rejoignent quand même à la croisée des parallèles.

Un dentiste taiseux, austère, disgracieux, peu amène ; sa laide assistante sans doute un tantinet amoureuse de lui.

Interdit d’enquêter sur son propre cas, Maigret se défendra, bec et ongles, jusqu’à se voir contraint à l’arrêt maladie, malgré les filatures et les écoutes téléphoniques dont lui et son équipe seront les objets; il frôlera la mise en retraite anticipée (affront suprême) et lèvera un lièvre inattendu, une parfaite ordure tout autant qu’un pauvre type balloté par un fragment subi de son passé. Le commissaire se sortira du piège l’amertume aux lèvres, désabusé, désormais conscient du fossé abyssal qui le sépare de sa hiérarchie opportuniste, prudente et craintive qui ne l’a pas soutenu.

« Maigret se défend », paru en 1964, est un épisode atypique de la série. Maigret y subit désormais, en tant que présumé coupable, ce qu’il nomme « l’autre côté du bureau ». Il se met dans la peau de tous les criminels qui sont passés aux aveux face à lui. Il devient à son tour « L’homme nu » confronté à son propre destin, à son innocence qu’il doit prouver C’est, en outre, le tome initial d’un diptyque qui, en background, met en scène une série de hold-ups dans des bijouteries parisiennes et de la Côte d’Azur. Certains personnages reviendront au générique, il y avait en eux de quoi alimenter une suite qui n’en est pas vraiment une … et peut se suffire en one-shot.

Mme Maigret est de la partie, confiante et protectrice, toujours de bons conseils logiques sur le fil de bons petits plats amoureusement concoctés. Son mari n’est pour rien dans tout cela, ce n’est pas son genre. Janvier et Lucas travaillent en sous-mains à l’établissement de la vérité, éternellement fidèles à leur boss de toujours. Pardo, l’ami docteur généraliste apporte ses connaissances médicales et ses conseils d’hygiène de vie que le Commissaire ne respecte pas, petits blancs sur le zinc et petits plats chez l’Auvergnat).

Un épilogue qui fait froid dans le dos, surprenant, simple, logique et implacable. Rien que pour çà, déjà.. ! A noter que la résolution de l’énigme tient plus à l’intuition de Maigret qu’à la multiplication d’indices à détricoter. J’aime le trouver ainsi quand il se met à l’unisson des gens qu’il côtoie.





Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Articles les plus consultés