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samedi 9 mai 2020

Un cobaye pour l'éternité - Jeremiah 05 - Hermann



Novedi Ed. 1981

Jeremiah et Kurdy en éternels vagabonds à la recherche de qui, un temps, les embauchera, parcourent une Terre post-apo qui, d'épisode en épisode, révèle une nouvelle facette. Peu à peu, dans le corps du cycle, se dessine un monde complexe et varié, crédible car argumenté, riche de ce que chaque épisode lui apporte.

"Un cobaye pour l'éternité" est un cinquième tome (1981), dans la lignée des précédents, presque en one-shot, si ce n'est que certains personnages perdurent dans l'ombre (Tante Martha) ou sont en promesse de récurrence à venir (Stonebridge) grâce aux potentialités que l'on y perçoit (un bon méchant ne fait jamais de mal en BD) .

Hermann ne chamboule pas les fondamentaux de la série, on ne change pas ce qui marche ... mais innove.

S'il nous montre toujours, façon western, des chevaux harassés par une longue marche, des cow-boys chapeautés de stetsons cabossés, des ceinturons porte-flingues aux révolvers jamais avares de bavardages, des gourdes rondes pendues au pommeau des selles ...
S'il nous livre encore les soleils couchants qui ensanglantent les Grandes Plaines, la poussière des chemins et la pluie à grands seaux jetée sur les égarés ...
S'il n'oublie pas l'Avant, cette "Grande Lessive" qui a essoré la Terre d'une grande part de ses occupants, en nous offrant au fil des paysages traversés les ruines et reliquats de l'ancienne technologie: les silhouettes en dentelles déchirées de pylônes électriques posés en ligne inutile sur l'horizon, un wagon sur un monorail suspendu délabré, un canal bétonné non dragué de ses ferrailles abandonnées, une zone industrielle désaffectée et une gare de triage où la rouille impose son lent travail de sape ...
Hermann innove en mijotant un scénario de pure SF. Il y sera question d'un des thèmes bateaux du genre, que je ne dévoilerai pas ici, si ce n'est l'effleurant en révélant une clinique hospitalière mais pas tant que çà, un médecin aux allures de Dr. Moreau (H.G. Wells), des ampoules en verre scellées autour d'un précieux liquide ambré, des patients qui patientent et d'autres qui meurent, une héroïne (de passage) bien belle et attachante mais pas tant que çà ... enfin tous les ingrédients au service d'un récit où se mêlent un amour déçu (tu m'étonnes), des vies ruinées, des vies recommencées, des richesses accumulées et détruites ... et une Terre qui ne fait rien pour oublier ses anciens travers.

Graphiquement, le versant SF se pare de longs couloirs blancs immaculés, de néons éblouissants, de machineries médicales high-tech et de tout une quincaillerie électronique d'interphones bip bipant à tout va, de chambres d'hôpital grand luxe et... même, d'une piscine autour de laquelle s'ébrouent des corps jeunes et encore insouciants.

Hermann me bluffera toujours: il est seul aux manettes et sert vignettes et textes de phylactères avec une maestria à l'égal du classique duo dessinateur/scénariste omniprésent en BD. Il y a quelque chose de profondément logique dans sa manière d'avancer dans le récit, l'histoire coule de source une fois la manière de l'auteur décryptée. Que du bonheur...!

A suivre.



4 commentaires:

  1. Marrant ce contraste entre époque du passé et l'autre futuriste..
    Quand tout s'effondre, on revient tjs aux anciens schémas, et on recommence, de manière linéaire :-D

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    1. Judicieuse remarque. C'est très souvent une tendance post-apo. Le moyen-age y a sa grande part. Les scénari réinvestissent les mêmes ornières bourbeuses du passé. Hermann, via le graphisme, pousse le lecteur à dénicher, comme en jeu (on y tombe plaisamment dedans comme dans un jeu de piste), les artéfacts d'un monde éteint et via les scénari s'ingénie à montrer que, quoi qu'il soit nécessaire de repenser, l'homme filera toujours vers les mêmes erreurs.
      Je suis curieux, dans le fil de ton propos, de connaitre les raisons qui ont poussé l'auteur vers un mix western/SF. J'ai quelque part un "Cahier de la Bande Dessinée" special Hermann qui doit bien aborder le problème. A suivre

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    2. https://www.youtube.com/watch?v=lq2KOV2yBBY&feature=youtu.be

      A 5'23" Hermann explique que, désirant se passer de scénariste, il s'inventa son propre monde possible au détour de la découverte qu'il fit du roman de Barjavel, "Ravage". Ce qui explique la genèse de la part SF de Jeremiah.
      Quant au western on entrevoit une continuité graphique de ce qu’il avait su bien rendre jusqu'à présent: la nature, les grands espaces … les hommes neufs qui l'habitent et qui s'y construiront sans manichéisme.

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  2. https://www.youtube.com/watch?v=qzJUlL1Ir6o

    Un bien beau diaporama (accessoirement bien mis en musique) qui centre tout l'art d'Hermann.

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