Dupuis - Collection "Repérages"
Le post-apo Sf génère immanquablement (ou presque..!) dans
ses figures imposées, à un moment ou un autre au coeur des romans qui s'y
rattachent, une secte qui, transformant
la nouvelle réalité en message divin dévoyé, menace le monde en ruines d'un
obscurantisme encore plus tenace que celui que les Jours d'Après lui imposent. Les survivants endoctrinés y
prennent le contre-pied de la logique de reconstruction d'un monde désormais
souhaité tout autre, indemne des tares du précédent. Hermann, scénariste-dessinateur des épisodes BD consacrés à Jeremiah, devait s'y coller. Le voici
au rendez-vous à l'orée du sixième tome de la série (1982).
Comment s'en est t'il sorti ?
L'opus s'ouvre dans les forêts montagnardes des Rocheuses parées
aux couleurs flamboyantes de l'automne. La nature reprend ses droits
(composante récurrente de la série). Le monde parait lavé de son noir passé et
écrit désormais son présent sur une page vierge étincelante de blancheur.
L'homme redécouvre les ors, les jaunes, les ocres et les marrons ... Mais
derrière les couleurs retrouvées ressurgiront celles des ténèbres quand l'épilogue
se fera au coeur des rouges saignants des brasiers incandescents de la secte,
au sein de la noirceur des cendres emportées en brouillard par le vent. Qui
pour la victoire alors que Jeremiah
et Kurdy semblent emportés par les évènements, résignés au fatalisme ?
A l'amorce du récit, deux chevaux à l'attelage tirent la coque blanche (sans doute en PVC) d'une caravane d'antan. On cherche la balle de tennis sur la boule d'amarrage. Le véhicule est monté sur de hauts pneumatiques (leur marque, peut-être des Michelin..?). Il a tout d'une bonne vieille diligence de la Wells-Fargo le long d'étroits chemins caillouteux à flanc de précipices.
L'attelage a quitté il y a peu le plat des Grandes Plaines, laissé
derrière lui une mégapole en ruines de bric et de broc retapée, via les grandes
courbes d'une autoroute au bitume délabré, sinuant entre les gratte-ciel aux
façades de vitres brisées.
Sur son chemin: la Secte ...!
Jeremiah et Kurdy
Malloy sont de la partie, en escorte de l'équipage; au service, semble t'il, de
l'Etat nouveau, accompagnent une sommité sans doute politique vers un
rendez-vous dont la teneur n'a guère d'importance, ni pour nos héros ni pour
nous lecteurs.
La suite appartient au récit..!
Comme d'habitude, largement mâtiné des clichés graphiques du
western, l'épisode se suffit à lui-même en one shot. Les personnages
secondaires, aux côtés de Jeremiah
et de Kurdy, sont à usage unique.
Peut-être reviendront t'ils plus tard, qui sait ? Ils sont bien campés dans des
registres qui pourraient les rendre utiles voire indispensables dans des
épisodes ultérieurs, intéressants dans leurs faiblesses et leurs forces,
archétypes du mal ou du bien.
Alors, au final ?
Hermann, seul au
scénario et aux dessins, semble marquer le pas. Comment lui en vouloir ? Sacrée
prouesse que celle d'assurer conjointement les deux fonctions. Il y a réussi
tant et tant au cours des cinq épisodes précédents, qu'une petite faiblesse
scénaristique n'est rien, elle passera et le mieux reviendra. Et encore, faut
t'il relativiser. L'histoire parait à la traîne du visuel. Ce dernier impose un
tel rapport de force en sa faveur que le reste s'amoindrit. Le graphisme est si
prégnant, si travaillé pour rendre le max de son jus, que le contenu des phylactères
perd de son intérêt. La pointe des crayons au service des dessins (un excellent
coloriste, en force ou en nuances fera le reste) éclipse les mots et les
phrases. Dommage..? Même pas, j'y ai trouvé néanmoins mon compte, l'oeil rivé
aux cadrages presque cinématographiques que l'auteur sait manier à la
perfection.
La pirouette scénaristique finale s'efface au regard de la flamboyance graphique qui la précède. Des 6 tomes lus, celui-ci me parait maillon faible de part le déséquilibre entre la narration et le graphisme. Il m'en restera les vignettes au détriment des phylactères.
joli décor! ( pour les 2 premières images )
RépondreSupprimerN'est-ce pas..!
SupprimerEn SFFF écrite, malaxé avec le western, on trouve "Bloodsilver" de Wayne Barrow (pseudo couplant deux auteurs français: Johan Heliot et Xavier Mauméjean) qui en plus de partir à la Conquête de l'Ouest le font en compagnie fantastique de vampires. Étonnant, atypique (pour ce que j'en sais) et intéressant.
RépondreSupprimer[img]https://images.noosfere.org/couv/f/foliosf357-2010.jpg[/img]
_ Avin : « Des 6 tomes lus, celui-ci me parait maillon faible de par le déséquilibre entre la narration et le graphisme. Il m'en restera les vignettes au détriment des phylactères. »
SupprimerMince ! Il me tente quand même, celui-là, pour le thème de la secte, en décors de western.
(et puis en BD, mon intérêt penche plus pour les dessins que pour les scénarios, alors...)
_ Avin : « En SFFF écrite, malaxé avec le western »
Il y a aussi la novella de Roland C. Wagner, Celui qui bave et qui glougloutte (la novella, pas Roland... ^^)
J’ai lu récemment un mélange western/horreur cosmique : la nouvelle Bulldozer de Laird Barron.
Intéressante mais je la déconseille aux débutants en lecture en anglais : c’est bourré d’argot
(heureusement qu’une étude de cette nouvelle est en ligne pour dépanner !)
@Jim, citation: "Mince ! Il me tente quand même, celui-là, pour le thème de la secte, en décors de western.(et puis en BD, mon intérêt penche plus pour les dessins que pour les scénarios, alors...)"
Supprimer>>>> Le 06 est, jusqu'à présent, le plus cinématographiquement conçu. Une chronique sur Babelio en parle bien en ce sens, en mots techniques qui te parleront plus qu’à moi: « Hermann découpe ces scènes comme un film. Il a une technique telle qu'il peut se le permettre. Plongées, contre-plongées, cadrages particuliers, gros plans... il alterne toutes les astuces. Et cela fonctionne.* »
https://www.babelio.com/livres/Hermann-Jeremiah-tome-6--La-secte/26205/critiques/1087849
Ta dernière intervention ici en ce sens fut pour l’épilogue de « Ô Dingos, Ô Chateaux » signé Tardi. Il me faut reconnaitre qu’en termes de vivacité cinématographique la fin de la BD est quand même un cran au-dessus.
Le tome doit être aisément trouvable en médiathèque (je parie que tu le trouveras lu et relu, car passé en de nombreuses mains), c’est quand même du tout-venant. Hachette Collections a accordé récemment à la série la consécration d’une republication Presse, preuve s’il en est que sa potentialité commerciale est là.
https://youtu.be/bDhnoMrMF6I
@Jim, citation: "Il y a aussi la novella de Roland C. Wagner, Celui qui bave et qui glougloutte (la novella, pas Roland... ^^)" >>>> Cà me fait penser, je prend de l'age, il va me falloir surveiller çà ..! MDR.
Supprimer@Jim, citation: " je la déconseille aux débutants en lecture en anglais"
Supprimer>>>> §Et bien entendu, comme d'hab, on lui a épargné la trad en français.