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lundi 2 septembre 2024

Led Zeppelin - US Tour 1973, Mobile, Alabama (2024)

        Bootleg* ou pas, cet album étonnant, sorti en 2024 et acheté en hypermarché pour 15.99 euros ? Je m’interroge.

        Comme les Rolling Stones et Aerosmith, le Zep fut, durant les 70’s, un des groupes rock les plus souvent piratés* et distribués clandestinement ; on trouvait les LPs coupables sous le manteau discret des disquaires d’occaz qui s’en faisaient les relais. Les afficionados du combo étaient peu regardants sur la qualité sonore embarquée, elle était le plus souvent désastreuse et flirtait parfois avec l’escroquerie ; les pochettes pouvaient même être dégueu, quelle importance ! Affichées à des prix exorbitants, ces galettes clandestines de vinyle noir se vendaient au prix de la rareté et de l’illégalité ; seul comptait l’objet d’autant que certains, prétendument, ne sortaient que numérotés en séries limitées (naïfs que nous fûmes ..!). Peter Grant**, manager du Zep, pouvait râler et menacer, sortir les biscottos et déchainer la machine à baffes, rien n’y fit et la vague de cire noire souterraine perdura ; un marché parallèle se vit offrir des jours heureux.

        Nombre de bootlegs zeppeliniens virent le jour et connurent des succès disparates : du nanan ou de la broutille anecdotique inaudible, du bon du moins bon du mauvais du très mauvais, du foutage-de-gueule, du grandiloquent super-luxe. L’attrait dépendait de la qualité du son inclus, lui-même tributaire des conditions d’enregistrement : live audience*** total pourrave le plus souvent, soundboard****, broadcast FM*****, son studio hyper léché issu des master-tapes****** elles-mêmes, outtakes******* et rares inédits.

        Le nec plus ultra était de dégotter les bootlegs de combos qui n’avaient pas (encore) accroché un live à leurs discographies officielles. Ce fut longtemps le cas du Zep qui mit une éternité (incompréhensible) à mettre sur orbite vinylique une de ses prestations scéniques. Et encore, quand parut enfin le live espéré comme l’Arlésienne, il ne laissa entendre (Grrrrrrrrrr… !) que des interprétations mollassonnes à bailler d’ennui. Les fans revinrent alors sur les chemins de contrebande, eux au moins proposaient des perles bien plus énergiques et surtout représentatives de l’énergie furibonde du groupe sur scène.

    Friands du concept et, par ce biais, des Bootlegs du Zep, curieux de débusquer et de chiner ces rares LPs mystérieux (et élitistes), nous songions à tous ces concerts mystiques disparus, évanouis, jamais officiellement  diffusés, sauvegardés néanmoins dans la cire noire grâce à la folie de quelques fans « complètistes » ou opportunistes mercantiles. Nous aurions pu être virtuellement de chaque concert (presque tous furent bootleggés), outre-Manche, outre-Atlantique, partout en Europe, béats et bienheureux, conscients de la magie unique de chaque show. A défaut de notre présence, nous retrouvions le groupe partout dans le Monde sur la platine stéréo le casque sur les oreilles. Seule la thune manqua, je n’en ai que peu …

        2024, les temps changent ; s’effritent et basculent sans doute dans le bien public les droits d’auteur du Zep ; s’érode et passe de mode l’allant qui poussait irrésistiblement vers la zique du groupe des millions de gamins (maintenant vioques survivants demeurés immatures); rentrent peu à peu en EHPAD les fans d’antan qui maintenant headbangent******** poussivement dans le carcan métallique de leur déambulateur ; deviennent anecdotiques ces relents nostalgiques d’un temps sans doute en DLU ?

        Led Zep est mort … vive Led Zep. Et maintenant que deviennent ses LPs sur lesquels plongeaient nos regards ébahis et nos oreilles impatientes ? Que penser, par exemple, de ce « Us Tour Alabama 1973 » : est-ce un bootleg qui s’ignore vendu légalement désormais en hypermarchés comme du steak haché (15,90 euros seulement) ? Est-ce un disque officiel tout banalement non référencé, un semi-pirate toléré, un bootleg assumé et conscient de son parfum clandestin de contrebande ? Et me posant la question d’une nostalgie somme toute inutile n’est-ce pas, après tout, qu’une inutilité poussiéreuse, un truc de vieux con pour les vieux cons ?

        M’en fou.. ! Au final le plaisir de l’écoute des vieux airs du Zep est toujours là. Pourvu qu’on est l’ivresse ..! Le package est bien conçu, de bonne qualité dans l’esprit graphique typique de l’époque (la une de couverture reprend l’affiche-concert de la tournée) ; le son est à l’avenant, limpide et rond, graisseux et électrique. Du travail de pro ? Du sounboard ? N’empêche, le tout s’entrevoyant malgré tout OMNI (Objet Musical Nébuleusement Identifié), il réveille cette vieille marotte des bootlegs chez l’ado que je fus et qui, naïvement, rêva de les posséder tous. Au final, en vinyle pirate du Zep, je n’en ai qu’un ; c’est « Live in Seattle 73 Tour » ; le son est pourrave mais la pochette est si belle dans son minimalisme de photo solarisée.. !

         Le présent double-CD, sorti en 2024, a été enregistré live en 1973 à Mobile (si, si, j’ai vérifié ; c’est bel et bien une ville US ; plus de 200.000 âmes ; la troisième de l’Alabama). Ce fut un concert unique, le RDV d’un seul soir ; le show est inclus dans le troisième US TOUR de Led Zeppelin. Le track-listing n’y est hélas pas au complet ; « Heartbreaker », « The Ocean » et « Whole lotta love » manquent comme retrouvés sur « Live in Seattle 73 Tour » qui date du 17 juillet (à peine deux mois plus tard). « Alabama » reprend donc dans l’ordre les mêmes titres sauf les trois derniers. On peut regretter ces absences, d’autant plus que la qualité du son embarqué sur « Mobile, Alabama,1973 » pouvait laisser espérer l’intégralité du show . Y avait ‘il place pour sur le fil de 2 CDs ? Possible. Regrettable amputation néanmoins qui aurait mérité un 3ème CD.

        Les mêmes titres ! Quoi de plus normal ? On est dans la période faste du combo qui cible sur scène un best of attendu presque définitif, celle d’un Zep au zénith de son art, quand les mêmes chansons s’imposent d’elles-mêmes soir après soir et que certaines du « House of the holy » à venir dans les bacs (1973) se frottent à un public qui les entend pour la première fois.

        Seul bémol, la voix de Plant qui, parfois et brièvement sur certains morceaux, se déchire et s’écorche de trop dans les aigus qui, pourtant, étaient son terrain de prédilection (problème de mixage ?). Bonus : la rythmique qui, sans être trop prégnante, s’affirme et s’impose, ronde et virtuose, aux côtés de la guitare ; elle laisse entendre clairement les jeux implacables et virtuoses de la basse et de la batterie.

        Ce double-CD tourne inlassablement depuis quelques jours sur ma platine. Le plaisir d’un tel voyage musical dans le temps m’a "tempotranslaté" vers mes années adolescentes durant lesquelles le Zep et d’autres machines à gros sons ont squatté mon univers.

PS: 

*Pirate/bootleg, dixit Wikipedia : « Enregistrement d'un concert depuis le public ou récupéré sur la table de mixage voire un enregistrement studio dérobé, et cela sans aucune autorisation ». Il suffisait le plus souvent, à l’époque, d’un banal magnéto à bande ou d’un mini K7, d’un micro et de quelques piles. NB : de nos jours, un rempart d’écrans de tel portables allumés et tendus vers la scène à bout de bras ne semble plus gêner personne.
 

**Peter Grant : le mythique manager de Led Zep. Un personnage haut en couleurs. Son physique imposant, son caractère ombrageux, son attirance pour la baston protégeaient le combo des galères inhérentes aux tournées. Il avait pris l’habitude, à Londres, de descendre en ville et de systématiquement détruire les bootlegs du Zep dénichés chez les disquaires d’occaz.
 

***audience : c’est le bootleg de base, celui (le plus souvent mal) enregistré depuis le public avec un matos rudimentaire.
 

****soundboard : le son est directement piqué sur la table de mixage ; cela demandait de la complicité.
 

*****broadcast FM : nec plus ultra, c’est le repiquage sur vinyle de shows destinés aux radios quelques fois FM, d’où l’intérêt.
 

******master-tape : bande-mère, celle qui est la toute première à sauvegarder un enregistrement.
 

*******outtakes : prises alternatives de travail studio concernant des chansons qui seront connues sous leurs formes définitives.

********headbanging 

 




 

Dessin perso

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