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lundi 24 mars 2025

En cas de malheur – Georges Simenon

Réédition "Livre de Poche". La première édition en "Presses de la Cité" date 1956


Elle et lui …

Lui, Maitre André Gobillot, homme de robe réputé, la quarantaine finissante, qui en « Je narratif », présente, ici, ses confessions intimes… au regard du drame qui s’annonce et dont il est un des acteurs.

Depuis un an, sa vie privée, sa vie tout court par effet rebond, se découd point après point, et ce jusqu’à l’irréparable accroc. La faute à une jeune femme, sa maitresse inconstante, une délinquante qu’il a fait acquitter, qui lui cause tracas que la raison aurait pu éviter. Voici le récit des faits et circonstances, des causes et conséquences d’une perte de contrôle sur la vie. Le lecteur se fera juge du drame en cours jusqu’à sa conclusion fatale, et selon ses convictions prendra position ; « Un homme nu » (cher à Simenon) passe à confesse, se raconte pour mieux s’expliquer ; un être diminué et rongé peu à peu se dessine dans ses faiblesses et défauts pour mieux se détruire.

Début des 50’s, sous les ors de la Quatrième République, André Gobillot est un avocat parisien de renom, pugnace et peu regardant sur les moyens (quitte aux connections avec la mafia, aux faux témoignages et à la caricature des victimes quand il s’agit de faire innocenter un coupable) ; c’est un homme de robe qui, loin de la veuve et de l’orphelin, défend, invariablement avec succès, ses pairs de la Haute Société égarés dans des affaires crapuleuses, le plus souvent financières. Gobillot : un fauve oratoire, aidé par son épouse en un duo implacable et vénal, qui sous le couvert de la légalité, se vante d’acquittements injustifiés là où d’autres n’arrachent rien, ou au mieux des non-lieux.

Il se perçoit, ses mots sont durs, gras, petit et laid, homme sans attrait si ce n’est via l’image de pouvoir qui est sienne, presque comme une vengeance sur le sort. Un mariage de raison ou peu s’en manque ; des passades amoureuses clandestines sans lendemains, ni envie ni plaisir ; une vie mondaine dans l’entre-soi, autarcique et sans éclats ; un dédain assumé et pitoyable de lâcheté des classes subalternes (sa secrétaire, qui se sent des faiblesses pour lui, amoureuse transie et silencieuse, se voit sans cesse rabrouée). En filigrane de ses confessions, sans qu’il se l’avoue vraiment, on perçoit un être détestable et vil, centré sur l’argent qui peut tout et le pouvoir à n’importe quel prix, qui fait plier autrui.

Une vie réussie à l’aune de ses critères ? Va savoir ! Il suffit parfois d’un détail, d’un grain de sable… pour qu’en boomerang

Elle, Yvette Maudet. Auteure maladroite d’un hold-up minable, de plus raté. Gracieusement, Gobillot plaidera sa cause et la fera acquitter en échange de certaines faveurs. Trajectoire classique d’une jeune et belle provinciale des 50’s, montée à Paris sans argent, en rupture familiale, qui veut croquer la vie jusqu’à plus faim. Une belle plante, immorale et sensuelle, bientôt à fleur de bitume si elle n’y prend pas garde ; qui plus est écervelée et autocentrée, entre innocence et cynisme, au cœur d’une naïveté de façade, elle entrevoit les écueils de son avenir et les moyens, via son physique, de les contourner. Suffit de jouer serrer et de voler les âmes mâles qui gravitent à sa portée. Une femme entretenue, à dispo, néanmoins empathique et reconnaissante. Un amant de cœur, un autre de raison par qui l’argent vient et se disperse dans les cabarets, restos en vue et boites de jazz à la mode. Pour elle, Gobilot ou un autre, peu importe, sur le fil des circonstances. Un mix classique, invariablement détonnant quand l’amour peu partagé s’en mêle. Gobillot possède le physique d’Yvette mais n’atteint pas son âme.

La suite appartient au récit … 

Une critique de la haute bourgeoisie à la toile émeri ; un double portrait à l’acide qui fera les choux gras de Claude Autant-Lara adaptant le roman en 1958. Un film où s’attisent certaines des caustiques obsessions sociales du réalisateur, bien avant qu’il ne plonge dans les eaux sales d’un déni historique. Une scène d’anthologie : Bardot, provocante et sûre de ses charmes, soulevant sa jupe au coin d’un bureau ; Gabin, silencieux et les mains dans les poches, qui, dans la jeune chair entrevue, y perdra son âme. Côte à côte, face à face, la cohabitation inattendue de l’expérience ciné d’un Gabin à son apogée et la fragilité théâtrale, naïve et quelque-part trompeuse de Bardot, depuis peu promue au rang d’un mythe … qui créa la femme. Une scène-scandale, une censure qui pointe son nez, un film au sommet d’une époque. Le long métrage perd en fidélité d’adaptation quand il se détache de son schéma narratif premier, celui du journal intime ; l’introspection y faiblit, mais pouvait t’il en être autrement en 25 images/seconde ? Le scénario édulcore certains passages tout en restant assez fidèle au roman.

Le roman. Une prose plus dense qu’à l’ordinaire, malgré tout détachée et fataliste, inscrit dans le milieu aisé qu’elle décrit ; celle d’un homme cultivé qui sait manier les mots dans leurs complexités d’agencements. C’est, après tout, son métier. Peu à peu, sous des tournures de phrases de plus en plus fébriles, perce un décalage entre les artifices de façade et ses pensées, introspectives et souterraines…

L’épilogue, bien que prévisible, n’est pas celui que j’attendais. Il en existait une variante que Simenon et Autant-lara n’ont pas emprunté. Un drame est passé. Qu’en reste t’il ? … sinon un cadavre et un assassin ; un « homme nu » brisé, rongé jusqu’à l’os, miné, implosé, rendu à la justice et à sa femme ; son témoignage-papier, cet « en cas de malheur » comme une volonté de s’expliquer à postériori, de plaider sa propre cause et celle de quelqu’un d’autre, de se trouver des circonstances atténuantes … passez muscade, Simenon tire sur l’ambulance. Le destin sera sans pitié.


 

 

vendredi 21 février 2025

La patience de Maigret - Maigret – Georges Simenon

 

Réédition Livre de Poche n°14221 (2011)

« La patience de Maigret » (1965), 70ème tome de la série, est, à la suite de « Maigret se défend » (1964), le second volet de l’unique diptyque de la saga. Encore est-il parfaitement lisible en one-shot. Certains personnages, sur les mêmes lieux ou presque, coupables ou complices de crimes résolus il y a dix jours à peine, ont disparus du paysage, ont été arrêtés et sont incarcérés ; d’autres, déjà présents, jusqu’alors simples témoins, prennent désormais les premiers rôles sans avoir vraiment été les seconds couteaux du premier.

Une affaire chasse l’autre : celle initiale, celle de « Maigret se défend » est close ; une autre pointe son nez, occulte la première et ouvre de nouvelles perspectives.

« La patience de Maigret » est la résurgence thématique d’une enquête inaboutie qui traine, irrésolue, depuis une vingtaine d’années, dans les cold cases du Commissaire. Elle concerne, en background des deux affaires, une longue série impunie de vols de bijoux que Maigret n’a jamais pu décrypter. Des hold-ups successifs jusqu’à la refourgue en passant par le recel et la retaille des pièces tout reste irrésolu : aucun indice, à peine des soupçons qui portent sur deux personnages d’importance dont l’un vient de mourir.

Maigret enquête sur l’assassinat de Manuel Palmeri, une de ses vieilles connaissances du Milieu. Il vient d’être tué chez lui, dans son fauteuil roulant, d’une balle dans la nuque. C’était un vieux « truand à papa » respectueusement imprégné des anciennes lois du Milieu, un caïd infirme, victime il y a deux ans d’un règlement de comptes qui l’a laissé sur le carreau de ses anciennes activités maffieuses (mais va savoir ?). Le commissaire le suspecte depuis des années de jouer les prolongations et le fait surveiller de filatures à peine discrètes en téléphone sur table d’écoute ; mais cela n’a pas empêché son assassinat. Le caïd s’est toujours montré prudent dans ses rapports avec la police, lâchant du lest de temps à autre ; malin et l’air de rien, il s’était fait discrètement indic ponctuel, balance à minima, en échange d’une certaine tranquillité policière. Maigret le respectait néanmoins, voire l’admirait, l’estimait à l’aulne des vieilles règles du Milieu que le truand se faisait un point d’honneur à mettre en avant. Son violent décès impose à Maigret de trouver le coupable et, quelque part, de venger un mort, presque un ami ….

« Pourtant, il y avait tout au fond de … [Maigret] …, si ce n’est de la tristesse, tout au moins une certaine nostalgie. La mort de Manuel Palmeri n’était pas de celles qui endeuillent la société. »

Aline Bauche, sa jeune compagne, une ex-tapineuse rangée du trottoir sous le vernis craquelé d’une femme honorable ; elle se veut aide-soignante au chevet d’un être diminué, garante honnête de ses finances en cours (et il y a du pognon.. !). Aline appelle tendrement « papa » l’homme qu’elle aime malgré son handicap. Maigret est fasciné, voire secrètement enclin à certains sentiments amoureux, mais il sait qu’il ne franchira jamais le pas vers les aveux ; leur relation est trouble ; empreinte de la distance entre le chasseur et sa proie potentielle. L’un est tendre mais, job oblige, inflexible ; l’autre haineuse et à deux doigts parfois de retrouver ses manières et son parler d’antan.

«_Tu as tort, papa, de recevoir le commissaire. Les flics je les connais, et ils m’en ont fait suer. Celui-ci ne vaut pas mieux que les autres. Un jour tu verras, il se servira contre toi de tout ce que tu lui laisses te tirer du nez » 

Simenon, Maigret et le Milieu. Une plongée en compagnie de ses pontes, de ses caïds rangés des voitures, demi-sels, porte-flingues, maquereaux, barmans, portiers de nuit … Le tout noyé dans le microcosme d’un immeuble parisien de rapport où s’agglomèrent quelques strates de la société !... Rentiers, voyageur de commerce, prof d’éducation physique, bonniches … etc.  Vue en coupe d’un immeuble parisien de la fin des années 50’s ; proprios et locataires tour à tour sur la sellette ; l’un deux est peut-être coupable à moins que …

« C’est ainsi que le commissaire avait réussi la plupart de ses enquêtes : en montant des escaliers, en reniflant dans les coins… [ ] … en posant des questions inutiles »

Maigret instille la peur et confine ses suspects, le huis-clos s’amorce.

… la suite appartient au récit … conduisant le commissaire à une terrible colère empreinte de vengeance.

Deux jours en juillet pour mettre un terme à une enquête qui traine depuis deux décennies … c’est la patience de Maigret.

PS : en 1994 la TV adapte « La patience de Maigret ». Bruno Cremer est aux premières loges. Agnès Soral, dans un registre cousin de son rôle dans « Tchao Pantin », endosse l’habit d’Aline. Elle y fait merveille malgré un tout assez décevant car largement infidèle à l’orignal papier. Cette version succède à celle de 1984 avec Jean Richard, bien pâlotte et inutilement teintée d’humour. Pas d’adaptation ciné ; pourtant l’intrigue s’y prête, même si elle est facilement décriptable.

Sur le fil de mes lectures, un Maigret suit ainsi l’autre. Et je ne m’en lasse pas. C’est un gage de qualité. Celui-ci montre un Maigret entre cœur et raison, le plus difficile des rôles.

Re-PS : Tournent, tournent les génériques TV. A chaque fois une belle réussite. Quelques notes à peine qui se tatouent sur les tympans…

Jean Richard

Bruno Cremer

samedi 15 février 2025

La folle de Maigret – Maigret – Georges Simenon

 

1970, réédition de 1997

« Une petite vieille toute menue qui portait un chapeau blanc, des gants de fil blanc, une robe gris fer … [ ] … elle ne devait guère peser plus qu’une gamine. Son corps s’était comme épuré avec le temps et elle avait la peau diaphane. »

Léontine Antoine de Caramé, une vieille dame très digne et bien comme il faut, une parmi tant d’autres, petite et fluette, gentille et tendre, polie et respectueuse dans ses rapports avec autrui ; une octogénaire paisible, esseulée, deux fois veuve, fragile et discrète ; un de ses êtres gentiment accroché au bout du bout de la vie qui leur reste et glisse encore gentiment autour d’eux. Sa journée : le matin au marché, un banc du Jardin des Tuileries l’après-midi, la télé le soir, parfois le cinéma, des photographies sépia sur le marbre de la cheminée, des lettres jaunies, la concession à perpétuité de son premier mari qui l’attend quand le moment sera venu ... En attendant, des relations sociales réduites à peau de chagrin. Un bien triste constat au jour le jour… Une histoire simple en somme. C’est si facile d’oublier les vieux …

« Elle avait dépassé le peloton de ceux qu’elle avait connus et qui tous étaient morts avant elle »

Léontine sollicite en vain audience à Maigret au 36 Quai des Orfèvres. « Une question de vie ou de mort » prétend-t ’elle.  Elle se plaint, par défaut, à un subordonné du commissaire qui recueille sa déposition. Elle se sent menacée et demande de l’aide. A son domicile, où elle vit seule, lors de ses rares absences, des objets se déplacent légèrement ; on la suit dans la rue, elle le sent, même si, se retournant brusquement, elle ne perçoit personne de suspect derrière elle.

« Une folle, c’est une folle.. ! » tranche le commissaire qui ne donne pas suite. Les jours passent, la vieille dame est assassinée chez elle. Maigret culpabilise et se met en chasse, il a à se faire pardonner.

Les personnages : la nièce de Léontine, la cinquantaine sur la mauvaise pente, hommasse et laide, portée sur la chose. Son amant, gigolo sans remords et ex-proxénète. Son petit-neveu, musicien « pop » au chiches engagements scéniques (nous sommes en 1972 et Simenon laisse entrevoir sa curieuse vision du rock). Un trio pour un, ou plusieurs coupables ... à moins que ! Maigret et ses inspecteurs à la pêche d’intuitions plus que d’indices sur le fil d’une enquête atypique. Les proprios et locataires de l’immeuble dans laquelle Léontine habitait en toute discrétion, comme un fantôme en ces murs oublieux de sa présence. Toulon et sa pègre. Paris en mai durant 8 jours de beau soleil ; la ville d’alors, à l’aube des années 70.

Tout du long des 75 épisodes que compte la série, les « Maigret », en tant qu’entités physiques séparées, n’ont jamais été bien dodus (invariablement moins de 200 pages en version poche). La qualité de chacun d’eux n’a jamais attendu la quantité de mots. Était-ce une volonté de l’éditeur ou de l’auteur d’ainsi passer vite au suivant ? « La folle de Maigret » n’échappe pas à la règle et se simplifie même encore plus la tâche. Le texte fait la part belle aux dialogues (rapides mais habilement agencés) et renvoie facilement à la ligne, le roman se lit vite, l’intrigue n’est pas compliquée et l’épilogue se lasse facilement deviner. L’achevé d’écrire précise : « 7 mai 1970 », à trois « Maigret » de la fin de la série en 1972. Doit-on y avoir Simenon qui, dans sa hâte d’en finir avec l’écriture romanesque, réduit la voilure des mots. Et pourtant, l’auteur ne bâcle pas, installe une intrigue soigneusement agencée, une galerie de personnages fouillés, les uns attachants, les autres repoussants, tous inoubliables.

Une des versions TV (1975, avec Jean Richard et Hélène Dieudonné dans le rôle de Léontine) installe un épilogue absent du roman ; Léontine défunte, en fantôme éthéré près d’un bassin de jardin public, se retourne sur Maigret et le gratifie d’un sourire éblouissant qui pardonne tout.

Léontine est de ces portraits en prose qui se tatouent sur nos cœurs de lecteurs quand ils se font les échos de réalités sociales non encore résolues. « La folle de Maigret » fait oublier son statut de roman noir et entre en littérature blanche ; c’est le grand prestige de Simenon.

Merci Monsieur.


 

lundi 11 novembre 2024

Monsieur la souris – Georges Simenon (1938)

Réédition 2009

 

«Monsieur la Souris» est un « roman dur » signé Simenon. Le drame policier embarqué se situe à la croisée de la mendicité de rue, de la pègre opportuniste, de la police tatillonne et obstinée, de la haute-finance internationale, hautaine, méprisante et sans scrupule. Simenon, une nouvelle fois, use de contrastes sociaux très marqués et renvoie, dos à dos, les divers personnages ; ils tissent, à eux tous, moins un drame qu’un conte cinglant. Le roman me semble à part dans l’univers de Simenon, mais je peux me tromper … je vais essayer de m’expliquer

Fin des années 30’s, dans le Paris des Champs Élysées et du quartier de l’Opéra, un clochard, surnommé « Mr La Souris », devient le héros malgré lui des conséquences policières d’un meurtre qu’il n’a pas commis et dont il est le seul témoin sans pouvoir en parler. Il a, en effet, sans avoir vu l’assassin, trouvé un portefeuille aux pieds d’un cadavre dans une belle auto en stationnement. Une grosse somme d’argent l’accompagne. Comment un clochard peut-il vivre dans la rue, sans risque, avec un tel pactole en poche ? Comment écouler la moindre grosse coupure sans éveiller la curiosité ? La Souris aura, mais en vain, l’art et la manière ingénieuse, prudente et calculée de blanchir les billets (sans leur contenant) aux « objets perdus » dans l’espoir de les récupérer au bout d’un an et un jour … Mais, naturellement, tout ne se passera pas comme prévu. Ce serait sans compter la pugnace opiniâtreté d’un inspecteur de la Police Municipale, voisin du Javert de Hugo, sa sottise et son vain opportunisme de carrière. Son nom, Lognon, surnommé le Malgracieux, claquemuré dans son intransigeance, son obstination et ses idées reçues ; on peut parler de harcèlement. On retrouvera le personnage dans quelques Maigret ultérieurs en compagnie des classiques Janvier et Lucas qui trainent déjà, ici, leurs guêtres. Quant à Maigret, pas de traces…

Le roman prend une tournure guillerette de l’opposition querelleuse de ces deux hommes, cette dernière virera à l’amitié inquiète de l’un pour l’autre quand la violence de la pègre se mêlera aux débats.   

Instinctivement, sur le fil de mes lectures, cet énième « roman dur » signé George Simenon aurait du attendre en PAL si un fait extérieur ne l’en avait extrait. L’œuvre n’est que rarement citée, semble n’appartenir qu’au ventre mou de la longue série tandis que d’autres, plus côtés, sont souvent cités au rang des incontournables du romancier ; ils ont ma priorité.  

Je suis, il y a peu, tombé sur un fichier «You Tube», relayant une adaptation radiophonique de « Monsieur la souris ». Écouter fut un plaisir, lire l’original une conséquence. Je suis passé des ondes moyennes au livre physique, et dans la foulée au cinéma (cf «You Tube» encore). Curieusement, la version radiophonique n’est pas, à ma connaissance, mentionnée sur « Wikipedia ». J’en ignore la date de diffusion. Probablement du temps de la Radiodiffusion Télévision Française. Une paille, en fait.. ! On y entend au générique, entre autres voix, celles remarquables de Maurice Biraud (essentiellement un homme de radio) dans le rôle de « La Souris » et de Jacques Fabbri (un acteur de théâtre) dans celui de Lognon ; celle gouailleuse, argotique et canaille du premier ; celle bourrue et éternellement chagrine et mécontente de l’autre.

Le lecteur et l’auditeur s’amusent de La Souris, de cet «homme nu» attachant, malin, espiègle, ingénieux, à l’aise dans un milieu marginal qu’il connait par cœur et qui, au final, est toute sa vie. Mr La Souris, tel qu’interprété par Biraud prend toute la place, squatte les ondes, son « je narratif » radiophonique constant fait oublier la neutralité du roman à la troisième personne du singulier. Quant au « Monsieur la Souris » de cinéma (1942) il emprunte une autre voie qui fait de Raimu un être souvent falot, effacé, balloté au gré des circonstances. Dans les trois cas, les backgrounds trop touffus de la Finance et de la Pègre ne faisant pas le poids, on a l’impression d’une bluette qui n’a, comme ambition, que d’amuser et d’attendrir, d’affronter deux personnalités aux polarités opposées, celle de Lognon et de Mr La Souris. La gouaille de l’un face au caractère atrabilaire et obséquieux de l’autre.

Oui, décidément, un « roman dur » bien à part … que du plaisir néanmoins.

Version cinéma (1942)
 

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