En mars 1969, à quelques mois du Festival de Woodstock auquel il ne participera étonnamment pas, le groupe californien Quicksilver Messenger Service se montre, avec « Happy trails » son 2ème album, à l’apex live de sa carrière, au summum de cet acid-rock toujours en vogue sur la Côte Ouest des Etats-Unis. L’opus, mythique s’il en est, marque, le temps de deux faces de cire noire, 50 minutes durant, l’apogée d’un état de grâce psychédélique au crépuscule des sixties US. « Happy trails », dont les morceaux ont été enregistrés en concerts en 68, s’installe au zénith flamboyant de la mouvance musicale hippie. Aux côtés d’autres pointures du genre, Grateful Dead, Jefferson Airplane et Big Brother & The Holding Company, le groupe semblait, jusqu’alors, ne pas avoir la notoriété de ceux susnommés et ne jouait que les seconds couteaux malgré d’évidentes qualités techniques.
… et pourtant, grâce à son
envergure scénique devenue légendaire, voici le combo au premier plan … avant son
déclin programmé, à peine deux ans plus tard. Car, là où, en twin-guitaristes
de légende, John Cippolina et Gary Duncan tutoyèrent les étoiles
à coups de prouesses virtuoses, de riffs croisés ou à l’unisson, de soli
« à-toi-à-moi » frôlant la perfection ... allait bientôt (re)débarquer
le despotique Dino Valente (vocals) au sein d’un line-up qui inaugurera
une facette plus folk-rock (et par là même discutable au regard d’un passé
flamboyant désormais sous l’éteignoir).
Je suis venu, jeune, à QMS via
son album de 1971 « What about me » qui, sous la main mise de Valente,
se montra pour le moins inégal, offrant néanmoins quelques titres de belle
qualité (« local color », « subway » et
« won’t kiill me » … etc). J’ai, ces temps, mis les mains sur
ce « Happy trails » que la critique encense depuis belle
lurette. J’ai ainsi découvert une autre facette du combo, celle axée sur ses
belles envolées d’acid-rock, toutes guitares virevoltant dans l’air du temps.
En 69, des scènes de Los Angeles à
celles de New-York, du Fillmore West au Fillmore East, les enregistrements live
retenus pour « Happy trails » vont marquer l’histoire du rock,
On stage, ils seront baignés des célestes improvisations, sous les pulsations
du LSD, de deux brillants solistes de la six-cordes. « Happy trails »
est un disque rock parmi les plus grands ; il revient régulièrement dans
les n° spéciaux de magazines (type « Rock et folk ») où la presse
spécialisée recense et critique « les meilleurs albums du rock » ;
pas un chroniqueur n’oubliera « Happy trails » au rang des
galettes noires de légende ; et c’est mérité.
La totalité de la face A cible un
standard de Bo Diddley. Son titre: « Who do you love ».
Le morceau s’y étire sur 25 minutes de grâce absolue. Il deviendra cheval de
bataille du combo sur scène. C’est une suite en 6 parties : ses extrêmes exposent,
inaugurent et concluent le thème principal ; les autres sont prétextes à
des impros solistes inspirées de chacun des membres ; le tout devient
territoire d’expérimentations sonores où chaque musicien prend sa part et son
évident plaisir. Les deux solistes tissent un monde où les questions/réponses
d’une guitare l’autre deviennent bavardages virtuoses pour le moins étonnants
et plaisants, cavalcades incessantes et impros denses et complexes. Tout change
sans arrêt de formes et d’intentions ; les comparses fusionnent,
s’éloignent l’un de l’autre, se retrouvent à nouveau, communient ; une
telle osmose est rare, c’est un summum du genre. Les canaux droit et gauche, en
ricochets incessants de l’un vers l’autre exposent les éclairs de notes
suraiguës si reconnaissables de John Cippolina et le jeu plus orthodoxe
de Gary Duncan.
La Face B, au-delà de « Mona »,
une autre reprise de Bo Diddley mais plus ramassée, embraye sur
« Maiden of the Cancer Moon » et surtout « Calvary »
où les impros reprennent leurs droits, renaissent.
« Happy trails » :
au fer rouge du rock psychédélique façon US de la fin des sixties ; un
quatuor, QMS, émargeant au Flower Power toutes guitares dehors ; le
chassé-croisé de quatre musiciens d’exception face à un public qui,
vraisemblablement, n’en demandait pas tant ; un disque en témoignage d’une
époque révolue ; une musique électrique ensoleillée aux couleurs de San
Francisco.
Superbe et indispensable chef d’œuvre.
Line up :John Cipollina
– Guitar, Vocals ; Gary Duncan – Guitar, Vocals ; David Freiberg –
Bass, Vocals, Piano ; Greg Elmore – Drums, Vocals, Piano, Percussion
Face A "Who Do You Love Suite" (25’22’’)
I. "Who
Do You Love (Part 1)" (Ellas McDaniel)
II. "When
You Love" (Gary Duncan)
III.
"Where You Love" (Greg Elmore)
IV. "How
You Love" (John Cipollina)
V. "Which
Do You Love" (David Freiberg)
VI. "Who
Do You Love (Part 2)" (McDaniel)
Face B (24’47’’)
01. "Mona" McDaniel 6:53
02 "Maiden of the Cancer Moon" Duncan 2:54
03 "Calvary" Duncan 13:31
04 "Happy Trails" Dale Evans 1:29
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