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jeudi 13 novembre 2025

Une nuit de pleine lune - Hermann + Yves H. (BD)

 

Glénat Editeur (2011)

Hermann est l’auteur (dessins et scénarios) de Jeremiah, un cycle BD post-apo teinté de western. Pour ce que j’en ai lu, je j’apprécie beaucoup. Qualités graphiques hors-normes et atypisme des scénarios sont au rendez-vous. La série courre avec succès, tant son créateur est prolixe, sur le fil d’une longue carrière, 43 tomes durant de 1979 à 2025. Mazette… ! rien que çà.. ! Sans parler des autres séries (Comanche, Bernard Prince, les tours de Bois-Maury …) et des one-shots en collaborations (ou sans).

Yves H. (scénariste) est son fils ; les deux générations font ponctuellement cause commune le temps de quelques one-shots ; l’un aux pinceaux, l’autre au clavier.

En 2011 sort « Une nuit de pleine lune », une de leurs collaborations intergénérationnelles. 

 Frissons garantis au cours d’un huis-clos nocturne angoissant. Cinq petites frappes sont de cambriolage et rien ne se passera comme prévu … çà va saigner… !

De nos jours, en été, sous une Pleine Lune de mauvais augure, une haute maison de maitre, isolée en proche campagne banlieusarde, attend ses visiteurs malintentionnés d’un soir. Un couple de retraités, de sortie ciné, l’habite. Cinq jeunes profitent de leur absence ; la serrure est forcée et l’alarme débranchée. Le coffre-fort résiste, l’artiche reste planqué sous le blindage. La bande de bras-cassés attend le retour du couple dans l’espoir de leur faire cracher le code du coffiot et celui de la carte bleue ; suffit d’être convaincants, quitte à la violence. Ils sont 5 petites gouapes : un geek éternellement connecté à sa console Nintendo ; une néo-gothique à air-pods ; un hacker du pauvre ; un fils d’immigré nostalgique du pays où il est né ; une grande gueule, gros muscles et petite cervelle. On est, bon teint, en pays de polar noir. Tous les ingrédients sont là. Ça va changer. Le carnage commence. Le polar noir entrevu se teinte soudain d’horreur sanglante. Bonjour l’hémoglobine en gerbes sur le papier-peint, bonjour les flaques luisantes de sang sur les parquets, bonjour les vies trépassées sur la lame d’un couteau de cuisine entre hall d’entrée et salle à manger. Une série noire s’amorce, c’est l’hécatombe ; le vieux désormais en chasse, lame de couteau en mains, n’est pas de la race à se laisser faire et taille dans les chairs. C’est un Alien à la Ridley Scott qui guette et frappe dans l’ombre, du grenier à la cave ; tue toutes lumières éteintes (sauf celle de la TV qui passe un concert rock et sert un temps de bande-son) ; c’est un Scream binoclard aux lames affutées, un Freddy nouvelle mouture.

On ne se méfie pas assez des vieux.. !

Cà saigne. D’abondance. Le scénar s’y complait jusqu’à l’os. Des vies trépassent au cœur de la nuit, sous une lune froide, placide et sereine, sans empathie aucune. Au petit matin, la messe est dite, les comptes sont réglés. Ils étaient sept… combien au final ?

L’Horreur (avec ou sans Fantastique associé), en tant que genre littéraire ou cinématographique, ce n’est pas mon truc. Je n’y frissonne pas de plaisir et essaie, en conséquence, de m’en abstraire au plus tôt, l’incompréhension de tout cela en ressenti final. Je ne m’attendais pas à ce long épilogue brutal et sauvage. J’étais, serein, en promesse d’un simple polar noir, voire d’un thriller sordide, pas d’un maelstrom sanglant à la Taxi Driver. Je suis tombé dans autre chose, sur 52 pages d’un ersaAuLors des tournag de Fantastique très réaliste, sans concessions et qui ne s’épargne pas les détails. Faut dire que c’est, néanmoins, bien mené, façon ciné, 25 images/seconde, gros plans, plongées et contre-plongées, plans américains …. Le fiston Hermann a fait des études ciné et le papa nous avait déjà habitué à des BDs en mouvements. Pas d’encadrés explicatifs en voix off. Les vignettes glissent sans heurts, la suivante sur la précédente, s’emboitent en un montage ciné très dynamique. BD ouverte, c’est une lampe magique qui s’allume.

La BD me semble un art entre roman et long-métrage ; là, avec Hermann et Hermann, le 9ème Art s’acoquine, encres de chine, gomme et crayons-mine mêlés, avec les bobines de film, la pellicule, les projecteurs et le faisceau de lumière posé sur l’écran blanc. « Une nuit de pleine lune » est une BD en cinémascope à interdire aux âmes sensibles. Elle fut, d’ailleurs, adaptée par Julius Berg en 2000 sous le titre de « The owners ». On en trouve une bande-annonce sur le Net. Les quelques instants retenus donneraient des frissons glacés à un pavé de béton.

Dans mon lit froid, hier soir, à lire ce H&H sous la faiblarde lueur de la lampe de chevet, couché comme recroquevillé dans un fauteuil de salle obscure, je me suis pris à redouter que la première s’éteigne et ne repousse plus la nuit, à espérer que la seconde s’allume enfin et éloigne les ombres.

Pour sûr, je caricature mon ressenti ; il masque en réalité ce foutu plaisir de voir les auteurs jouer avec nos fichues peurs, celui de les savoir jongler avec nos craintes immatures, de nous faire trébucher sur nos zones d’ombre. Alors BD ou film, polar noir ou thriller Fantastique, quelle importance… !

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