Au cœur des sixties US, le 10
mars 1967, sort le premier LP studio du Grateful Dead dans les bacs des
disquaires. Il se pose alors sur les platines Hi-Fi en accord avec l’air du
temps, à deux ans de l’apogée de Woodstock : Hippie-land, West-Coast psychédélique,
Los Angeles et San Francisco, fumette, LSD et Flower Power flamboyant encore à
venir.
L’opus, par nécessité financière,
est enregistré en 4 jours seulement ; il s’impose à l’instinct, dans le
désir, la fraicheur et l’essentiel de ce qui est possible. Dès la première
écoute on le perçoit comme un prélude, ramassé et compact, aux envolées qui
suivront sur le fil d’une longue carrière florissante. Son titre est
classiquement et banalement éponyme. Guitares psyché et sonorités semi acides comme
des éclats de ce soleil d’été qui semble éternellement surplomber la Côte Ouest.
Rien de vraiment spécifique, en somme, si ce n’est que les ingrédients-type du Dead-World
sont déjà bien en place. Le groupe, dès ses premiers balbutiements, se montre
plus qu’en gestation de ses ambitions dans ce rock direct et percussif qui
semble parfois s’offrir des instants de liberté jouissifs, de courts ébats
improvisés, préludes à de belles envolées sur scène, libres et fières de toutes
attaches. Certains titres phare, déjà présents dans la track-list, feront les
riches heures des concerts-marathons à venir. Plaisir palpable de jouer
ensemble, de constituer une famille, une tribu ; cohérence du line-up et
de ses ambitions.
Les 9 titres sont courts,
directs, presque ramassés (sauf un, le dernier, « Viola Lee blues »
de plus de 10 minutes offerts aux délires six-cordistes improvisés). On est
loin des complexes luxuriances musicales de « Anthem of the sun »
et de « Oxomoxoa » et surtout des longs épanchements
improvisés qui bientôt viendront et feront la marque de fabrique du groupe, sa
raison de jouer. Pourtant, les gimmicks de chacun des musiciens sont déjà là,
on les reconnait vite, on sent la présence de Jerry Garcia (g) à ses soli
clairs, cristallins, célestes et sereins ; celle de Lesh (b) à ses
notes précises toujours bien en place ; celle de Pig Pen (p+h) (à
son décès le Dead perdra son sens inné du blues à l’harmonica, au piano
et à l’orgue Hammond) ; de Kreutzman (d) en attente de son sosie duettiste ;
et de Bob Weir (g). Tous sont déjà aux commandes d’un line-up
classique. Leurs ambitions sont claires : du rock, du blues, de la country,
le tout brassé en un mix reconnaissable.
Je trouve nombre de charmes à cet
album humble, aisé d’abord et direct dans ses intentions, même si son intérêt n’est
encore rien à côté des réalisations qui suivront, « Aoxomoxoa »
et « Anthem of the sun » en tête. «First Album» marque
en somme le franchissement obligé d’une frontière entre ce que, d’un côté, le
line-up est capable de faire et ce qu’il rêve de construire, de l’autre.
La musique du Dead peut
paraitre désuète et vieillotte, à remonte-temps inutilement nostalgique ;
on peut s’y trouver addict ou à des années-lumière. Elle n’est et ne restera
que ce qu’elle a toujours été, éternellement vivante, libre et vivace… et c’est
très bien comme çà. Enracinée dans les genres immortels qu’elle propose et
enrichie des riches et fertiles impros dont elle sait se nourrir et s’exponentialiser.
Long live Dead.
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