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mardi 8 mai 2018

J.G. Ballard - Empire du Soleil





Le 8 décembre 1941, au lendemain de Pearl Harbour, le Japon fait main basse sur l'enclave internationale de Shanghai.
Jim, 11 ans, sujet britannique, verra son existence totalement chamboulée à compter de cette date.
Roman autobiographique suffisamment revisité pour apparaître œuvre de fiction, "Empire du Soleil", explicite les récurrences thématiques de l’œuvre SF d'un des plus grands auteurs du genre: J.G. Ballard et se suffit à lui-même comme œuvre généraliste évoquant la seconde guerre mondiale versant Pacifique.
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La famille de Jim appartient à l'une des riches communautés européennes, en l'occurrence britannique, qui est économiquement très implantée à Shanghai. Il est né dans la soie du colonialisme européen, à Shanghai même; l'Angleterre lui apparaissant alors contrée plus exotique que l'effervescence quotidienne parfois cruelle de l'enclave où il vit. Il y mène une enfance dorée, protégée, imprégnée du détachement british porté sur toutes choses, assommée de rigueur éducative, du nombrilisme colonialiste qui ignore ostensiblement l'autochtone ou du moins le confine au rôle d'une domesticité pratique, qui se doit d'être invisible et silencieuse.
La vie facile et factice.
Dans cette ville de tous les contrastes, coincée entre la misère totale de ses rues que Jim perçoit derrière les vitres de la limousine de luxe de ses parents sans véritable questionnement sinon comme allant presque de soi et l'opulence ostentatoire du quartier britannique, grands hôtels, riches et immenses résidences, gazon british, piscines de luxe et fêtes quotidiennes, Jim appartient à une micro société repliée sur elle-même, nostalgique de l'Angleterre victorienne et d'un empire qui peu à peu se réduit comme peau de chagrin.
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L'empire nippon envahissant Shanghai aura pour conséquences de le séparer durablement (3 ans) de ses parents à l'occasion des premiers mouvements de panique, de le couper de son ancienne vie, de lui apprendre la survie au rythme de la faim qui lancine et ronge, de la mort qui rode... Mais ceci appartient aux péripéties à venir que je me garderai de révéler, à moins que vous ne connaissiez le long métrage éponyme de Spielberg daté de 1987.
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Epreuve initiatique classique me direz-vous, si ce n'est que Ballard revisite cette quête à l'anglaise, chirurgicalement, au scalpel qui dissèque froidement la misère des hommes dans la misère des camps, l'opportunisme de trafiquants de n'importe quoi usant de la naïveté de notre héros, la mort à la chinoise comme un fatalisme ancré dès la naissance. Qui plus est, le regard est celui porté par un enfant qui bascule dans un paysage intérieur protecteur, un rêve éveillé, une réalité onirique de presque chaque instant au cœur d'un enfer pourtant réel. Et c'est ici que Ballard fait toute la différence: son récit est truffé d'éléments poétiques (souvent des descriptions, quelquefois des réflexions) qui essaiment le récit de perles poétiques étonnantes, de métaphores ambitieuses et inspirées.
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"Empire du Soleil" est un magnifique roman de littérature générale qui permettra aux amateurs de sa prose SF de trouver les racines de ses récurrences obsessionnelles au cœur de sa, entre autres, série des quatre apocalypses: Le monde englouti", "le vent de nulle part", "sécheresse" et "la forêt de cristal". Les autres y trouveront un roman réussi, étonnant, poétique et beau, sur un sujet qui ne l'est pas. Chapeau, Mr Ballard.

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