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samedi 30 septembre 2023

Maigret se fâche – Maigret – Georges Simenon (1947)

 

Réédition Livre de Poche, n° 31811 (2010)

Maigret coule une retraite paisible depuis deux ans dans sa petite maison de Meung-sur-Loire. Une riche et autoritaire veuve, Bernadette Amorelle, 82 ans, des cimenteries et remorqueurs « Amorelle & Campois » d’ Orsenne (lieu imaginaire des bords de Seine, non loin de Fontainebleau) l’y sollicite pour une enquête parallèle incognito (ce qui n’empêchera pas Maigret de re-côtoyer ceux du 36, quai des Orfèvres) : sa petite fille Monita est morte noyée il y a huit jours, elle qui savait si bien nager. La vieille dame pense à un meurtre et suspecte ses gendres, les frères Malik.

Orsenne : un coude majestueux de la Seine sous le soleil d’août, trois propriétés d’été splendides appartenant aux Malik, Amorelle et Campoix, des parcs immenses, des voiliers, des piscines, des cours de tennis, des pontons, des cigares à profusion, des mets fins, des soirées interminables …

L’un des deux frères Malik, Ernest, se révèle être une vieille connaissance de Maigret, un condisciple du lycée de Moulins où il passa ses jeunes années adolescentes. Fils d’un simple percepteur des impôts, il sut mener sa barque en épousant une des deux sœurs Amorelle, son frère Charles s’alliant par la suite à la seconde. Sa réputation : user de tous les moyens à sa disposition.

Maigret est vite agacé par son côté condescendant et hautain, son mépris silencieux à l’égard du simple commissaire de police qu’il est à ses yeux, son arrivisme masqué sous un vernis opaque d’humanisme et de sociabilité, ce tutoiement trop familier que Maigret ne se résout pas à lui renvoyer, sa manière ostensible d’étaler complaisamment ses biens, à démontrer sa supposée supériorité sociale de classe, cette manière de verrouiller dans un huis-clos familial silencieux celles et ceux qui l’entoure… cette détermination à taire un passé humble, celui issu d’une classe moyenne provinciale dont il a maintenant honte.

Maigret flaire de probables « squelettes dans les placards » et attend son heure. Ernest Malik coche toutes les cases du suspect idéal d’un meurtre non encore démontré, Maigret évolue comme un Columbo télévisuel ciblant un objectif tout tracé. La double détente d’une mise en abime finale en surprendra plus d’un.

Maigret s’immerge difficilement dans un milieu ambiant trop aisé, riche à en crever, hypocrite et fuyant, déterminé à le pousser à partir, résolu à l’acheter ou à le supprimer s’il le faut, pourvu que rien ne menace son assise sociale d’apparence respectable. Maigret s’entête, recherche les témoignages du petit peuple des écluses, de la servante de l’hôtel miteux où il couche, d’un ex-cambrioleur devenu honorable montreur animalier de Luna-parc …

Une nouvelle fois, Maigret déterrera des secrets de famille d’une noirceur absolue, dessinera le sombre et pathétique portrait d’un « homme nu » lâche, abject, exécrable et puant, habile à toutes les bassesses, résolu à tout pour ne pas déchoir socialement … et pour qui la notion de famille n’est qu’un levier comme un autre destiné à assoir ses ambitions. Maigret se satisfera, et comment le lui reprocher, du rebond ultime d’une enquête qu’il ne maitrise plus, pour, enfin, passer à autre chose en remerciant le destin qui lui n’oublie jamais rien…

Adaptation télévisuelle française de François Villiers en 1972, avec Jean Richard dans le rôle du commissaire.

Rééditions en omnibus
 

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